dimanche 22 avril 2018

Incipit 56 - Le parrain - Mario Puzzo


Aux yeux de ses voisins, Don Corleone est un patriarche,

un respectable père de famille qui a su donner à ses

enfants une éducation où les rigoureux principes de la

morale sicilienne s'adaptent aux nécessités de la vie

américaine. Mais sa vraie famille est plus vaste ; c'est

une des "familles" de la Mafia dont il est un des chefs les

plus aimés, mais aussi les plus respectés, car il est

raisonnable et juste. Pour eux, il est le Parrain.

Le Parrain, c'est l'évocation d'un monde souterrain qui

sape les fondations de l'Amérique, d'une pègre

redoutable que la société voudrait ignorer, mais que de

retentissants scandales ne cessent de révéler au grand

jour. De New York à Las Vegas, des somptueuses villas

de Hollywood au maquis de Sicile, voici le portrait d'une

nation gangrenée par ses syndicats du crime, sa guerre

des gangs et ses puissances occultes. 
 

 
''Assis dans la salle d’audience du 3è tribunal criminel de

New York, Amerigo Bonasera attendait que la justice se

prononce et le venge des deux hommes qui avaient si

cruellement blessé sa fille, après avoir tenté de la

déshonorer. Le juge, personnage massif et d’aspect

redoutable, releva les manches de sa robe comme s’il se

proposait d’infliger un châtiment corporel aux deux

jeunes gens qui se tenaient debout devant lui. Une

expression de mépris majestueux et glacé était

empreinte sur ses traits. Mais il y avait dans son attitude

quelque chose de factice que Bonasera percevait fort

bien sans se l’expliquer encore. « Vous vous êtes conduits

comme des dégénérés de la pire espèce », s’écria le juge,

d’une voix agressive. C’est vrai, c’est vrai, pensa

Bonasera. Des bêtes, des chiens. Les deux jeunes gens,

visage rasé, luisant comme un sou neuf, cheveux drus et

lustrés, proprement taillés en brosse, inclinèrent

modestement la tête et se composèrent le visage de

l’humilité contrite. « Vous vous êtes conduits comme des

fauves dans la jungle, reprit le juge. Et c’est une chance

pour vous que cette pauvre jeune fille ait su défendre

son honneur, sinon vous en aviez pour vingt ans. Mais, en

raison de votre jeunesse, de vos familles honorables,

parce que vous n’avez encore jamais été condamnés et

parce que, dans sa majesté, la loi ne cherche pas de

vengeance, je vous condamne céans à trois ans

d’internement dans un pénitencier. Avec bénéfice du

sursis. »

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