lundi 24 août 2015

dimanche 23 août 2015

Petit plaisir du dimanche - Danny Kaye


On a oublié aujourd'hui l'énorme vedette qu'a été Danny Kaye dans les années 50/60. Acteur, chanteur, danseur il fut un des comédiens les plus populaires tant au cinéma qu'à la télévision. Au cinéma son plus grand succès, '' Le bouffon du roi'' est un petit chef d'oeuvre de loufoquerie et de ''non sense''.
Dans l'extrait qui suit il dirige le New York Philarmonic Orcestra face au public afin de montrer ce qu'il se passe vraiment entre un chef et son Orchestre, Irrésistible...

jeudi 20 août 2015

La bande annonce du jeudi




L'homme de ma vie - 5 et fin

 
Le voyage du retour a été totalement silencieux. Je me sentais vidé comme assommé, nerveusement épuisé et étonné. Finalement cela n’avait pas été si difficile que ça. Affalé au fond de la pirogue, Yves tirait sur son joint ! Je l’aurais bien balancé aux piranhas !!
Je n’ai pas eu de nouvelles de l’ambassade ! La disparition d’un allemand de l’est a fait un peu de bruit à Brazza ! A un tel point que j’ai préféré tout raconter à mon patron. J’ai reçu une belle engueulade qui s’est conclue par un :
‘’Vous êtes quand même gonflé…’’ où perçait sinon de l’admiration du moins un certain amusement !!
Je fus rapatrié illico sur Port-Gentil où je donnais tout aussi illico ma démission.
Ce n’est que plus de 15 jours après que je recevais enfin une lettre de Detlef. Accueilli à l'ambassade de RFA de Kinshasa. On lui avait fait des papiers dans la nuit et il avait pris dès le lendemain un avion pour l'Allemagne. Il était maintenant dans un camp pour réfugiés pour ''debriefing''

Le 20 juin je prenais l'avion pour Paris. Detlef qui avait obtenu une ''permission'' de trois jours de son ''camp'' m'attendait à l'aéroport.

Je dirai peut-être un jour mes quinze mois et mes quinze ans avec Detlef. Quinze mois de passion, d’amour, de découvertes mutuelles mais aussi d’effritements quotidiens. Nous nous aperçûmes assez vite que notre complémentarité n’était pas, sur tous les plans, parfaite. Et je devins plus cocu qu’il n’est raisonnable de l’être. J’en ai peu souffert et lui en ai peu voulu. Mais je fis ce qu’il fallait pour qu’il le fût aussi. J’avais déjà remarqué chez lui une boulimie, un appétit de tous les plaisirs, une urgence à rattraper des années perdues. Parlant couramment l’allemand, l’anglais, le français, le russe, le polonais, il avait trouvé rapidement un boulot très convenable. Il était grisé par la liberté qu’il avait trouvée à Paris et les libertés que procurait une certaine aisance financière. Et pourtant il décida de tout abandonner pour entamer des études de médecine. Il avait toujours souhaité être médecin ; mais à la fin de ses études en RDA, règle du numerus clausus oblige, il y avait un trop plein de docteurs et un manque cruel de spécialistes de langues africaines… Les voies de Dieu ou de Marx sont impénétrables…
Il s’installa pour ses études à Sarrebruck, au plus près de la France et de Paris. J’allais le voir et il venait le plus souvent possible à Paris. Se développa alors une relation toute particulière bien au-delà de l’amitié et de la tendresse. Une sorte d’amour mais débarrassé de tout ce qui le détruit, le sape jour après jour. Comme une évidence.
Il était entré aussi facilement dans ma famille que dans ma vie. Ma mère était tombée rapidement sous son charme. Elle était émue par sa situation familiale, séparé de sa mère, qui n’apprendra que cinq ans plus-tard, contrairement à ce qu’on lui avait dit, que son fils n’était pas mort noyé dans le Congo. Et quel souvenir que la première rencontre, des années plus tard, entre ma mère et la sienne. L’une ne parlait pas plus l’allemand que l’autre le français. Detlef traduisait. Elles se tenaient les mains et avaient les larmes aux yeux. Il était devenu comme un second frère pour ma sœur qui le choisit comme parrain de sa fille.
Il devint médecin et commença une spécialisation d’acupuncteur. Mais restaient les excès et l’urgence de vivre comme s’il pressentait que le temps lui était compté. 84/87 il entama une valse à trois temps avec la vie, avec la mort. Premier temps un accident de voiture dont il sortit brisé, cassé mais vivant. Deuxième temps une méningite dont il n’aurait pas dû revenir. Maladie probablement annonciatrice du troisième temps de cette valse morbide, le Sida.
Décembre 88, entre Noël et le 31 décembre. Detlef m’appelle au téléphone.
‘’Renaud, je suis à Paris pour la journée. Je pars demain matin avec des amis passer les fêtes aux Canaries. On peut déjeuner ensemble ?’’
Rendez-vous est pris dans un restaurant place de la Bastille.
Je le trouve fatigué, amaigri, le visage marqué. Je le lui fais remarquer.
‘’Je suis fatigué, j’ai beaucoup travaillé. Mais je vais bien. Mes analyses sont bonnes, mon niveau de T4 a remonté. Je me soigne, ne t’inquiète pas, les vacances vont me faire du bien. Cette fois-ci je n’ai pas le temps de voir Jacqueline, Brigitte et Morgane. Mais je vais revenir en février passer 2/3 jours. Tu peux me recevoir ?’’
Le repas terminé on se retrouve Place de la Bastille devant le métro. On se dit au revoir. Je le retiens par le bras.
‘’Tu ne regrettes rien Detlef ?’’
‘’Regretter quoi ?’’
‘’Brazza, le Congo, tout ce que tu as fait ?’’
Il m’embrasse sur la joue et me dit à l’oreille :
‘’Je ne regrette rien. Tu es la meilleure chose qui me soit arrivée.’’
Et il s’est engouffré dans la bouche du métro. Au milieu de l’escalier il s’est retourné, m’a fait un geste du bras. Sur ses lèvres j’ai pu lire ‘’je t’aime’’. C’est la dernière image que je garde de lui.
Dimanche 8 janvier 1989, 11h du soir, le téléphone sonne. C’est Monika, son amie allemande :
‘’Renaud, Detlef est tombé dans le coma hier sur une plage ! Il est mort ce matin à l’hôpital.’’
Aujourd’hui encore je ne me souviens plus de ce que j’ai dit et fait ce soir- là !
Eté 75, la rengaine cette année-là c’est Joe Dassin ‘’L’été indien’’ :
‘’On ira où tu voudras, quand tu voudras et l’on s’aimera encore lorsque l’amour sera mort…’’
Detlef, qui avait aussi une âme de midinette, avait décidé que ce serait notre chanson.
Lundi 9 janvier 1989, mon radio-réveil sonne comme tous les matins à 6h45. Joe Dassin chante ‘’L’été indien’’. Assis sur le bord de mon lit, les coudes sur les genoux, la tête entre mes mains, soudain je réalise. Je me mets à pleurer. Et j’éprouve un sentiment que je ne m’explique pas. J’ai de la peine, une peine infinie. Mais je ne suis pas triste.


mardi 18 août 2015

Hommes à fossettes

Hommes à fossettes
Fascination de la fossette
Sexy la fossette
je te tiens tu me tiens par la fossette...
Au choix:
 
 
Et la plus belle de toutes les fossettes...







L'homme de ma vie - 4



Dimanche 27 avril
Sous l’équateur, aube et crépuscule sont courts. Le matin on passe, en à peine plus d’une demi-heure, de la nuit noire au grand jour ; et le soir la nuit tombe avec la même rapidité. Le soleil se levait derrière Kinshasa, sur le fleuve et la forêt. L’horizon était en feu. On aurait dit un matin de création du monde. A 6h30 j’arrivais à notre lieu de rendez-vous habituel dans les faubourgs de Brazza. Il était déjà là. Il m’attendait, seul, debout sous un flamboyant. Je me suis approché de lui et je l’ai pris dans mes bras. Il était vêtu d’un jean, d’une chemisette et d’une paire de tennis. Il tenait à la main un petit sac en plastique.
‘’Tu as quoi dans ce sac ?’’
‘’Deux paquets de cigarettes, mon slip de bain et une serviette.’’
Je me suis reculé un peu et je l’ai regardé. J’étais bouleversé. Je n’avais jamais vu quelqu’un d’aussi démuni. D’aussi ‘’nu’’. Ni d’aussi déterminé. Je me suis soudain rendu compte que s’il montait dans ma voiture dans une minute, il n’aurait plus rien à lui que ses fringues et son petit sac. Et un avenir incertain. Je l’ai regardé dans les yeux :
‘’Tu es sûr de vouloir le faire ?’’
‘’Oui ! Toi aussi ?’’
‘’…Monte dans la voiture.’’
Il a ouvert la porte arrière et s’est recroquevillé sur la banquette. Sa vie avait basculé. La mienne, dans une bien moindre mesure, aussi. Nous nous connaissions depuis à peine plus d’un mois.
Arrivés à l’endroit convenu, Christian, son cousin et la pirogue nous attendaient. Ils n’étaient pas seuls. Il y avait un européen, style routard baba-cool. Je regarde Detlef.
’’ C’est Yves, je t’ai parlé de lui. Il va venir avec nous. Il veut ramasser un peu de cannabis.’’
Il n’a pas l’air trop fier de lui, mais je suis désarmé par son sourire et ce n’est ni l’heure ni le lieu pour notre première engueulade. (Je m’habituerai peu à peu à ses ‘’surprises’’, à ses voltefaces, ses contre-pieds, ses improvisations…Ce côté imprévu, imprévisible faisait partie de son charme). Je me tournai du côté de Christian. Pas de réaction. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes.
‘’ Renaud, je te présente mon cousin, Thomas d’Aquin et un copain à lui !’’
Malgré la tension je n’ai pas pu réprimer un petit sourire. (Ah les hasards des naissances et du calendrier ! A Port Gentil j’avais déjà un Jean de Dieu qui travaillait avec moi). Leurs yeux brillants et injectés de sang étaient probablement le résultat d’un manque de sommeil et de l’usage conjoint du cannabis et la bière locale, la Primus. Et d’une équipée discrète à trois nous nous retrouvions à cinq dont certains n’avaient pas le même souci de discrétion que moi. Mais à cheval donné… et on ne pouvait plus faire marche arrière !
Il était près de 8h et le soleil était déjà haut. Je voulais partir au plus vite ! Je ne voulais pas risquer que l’on voit Detlef. Le plein était fait. Nous nous sommes installés dans la pirogue.
‘’Toi patron, ici, ton ami en face de toi et l’autre devant assis au milieu’’.
La pirogue stabilisée s’est mise à remonter doucement le courant.
‘’On arrivera quand sur les îles ?’’
‘’Vers 11h environ. Dans une heure on va arriver dans un village pour les feuilles. On reste pas longtemps et on repart.’’
‘’D’accord !’’ Le moyen de dire autre chose !
Une heure après nous arrivons en effet dans un village de quelques cases pas très loin du fleuve ! Quatre, cinq pirogues sont tirées sur le sable d’une petite plage. Mon passeur ne semble pas être un inconnu ici. Notre présence, Detlef, son ami et moi, suscite plus de curiosité. Une palabre en lingala s’engage. Detlef parle assez bien le swahili, étudié à l’université de Liepzig (mystère des règles de numerus clausus dans l’Europe de l’est de l’époque) mais ne comprend rien à ce dialecte. Thomas d’Aquin me prend le bras et m’attire un peu de côté.
’’Tu peux me donner un peu d’argent. C’est pour les feuilles. Tu déduiras ce soir.’’
Je lui glisse quelques billets, qu’il donne aussitôt à un grand gaillard. Et tout le monde s’en va dans les champs pour la cueillette. Je préfère rester près de la pirogue qui me semble la chose la plus importante dans cet environnement un peu ‘’fumeux’’. J’ai soif. Dans mon grand ’’professionnalisme’’ je n’ai rien apporté ! Je demande à boire mais je refuse poliment l’eau de la calebasse et je me contente d’une petite bouteille d’une boisson gazeuse chaude et sucrée.
Le temps passe. La petite troupe ne revient que plus d’une heure après ! Il est presque 11h. J’essaye de hâter le mouvement. On remonte dans la pirogue. Thomas d’A. tire sur le démarreur. Rien ! Une fois, deux fois, trois fois. Rien. Une sueur glacée me tombe sur les épaules. La quinzaine de paisibles cultivateurs de cannabis réunis sur la plage se transforme aussitôt en mécaniciens et garagistes. Ca parle, ça crie, chacun donne son avis. Des outils sortent de partout. On visse, on dévisse, on souffle dans des pièces, on nettoie à l’essence, on huile, on va chercher une pièce sur un vieux solex abandonné ici on ne sait comment. Je suis effondré. Detlef lui-même commence à s’inquiéter. Yves lui, tire sur son joint. Je le jetterais bien aux crocodiles dans le fleuve. A midi bien sonné, on remet la pirogue à l’eau et St Thomas d’Aquin fait un miracle. Le moteur se met à crachoter. Je hurle :
‘’Touchez plus à rien !!’’
La pirogue se remet à remonter doucement le fleuve. Je n’ai plus qu’une angoisse. Une nouvelle panne et ne jamais rejoindre ces îles ou même y arriver trop tard après le départ des pique-niqueurs du dimanche ! Detlef est aussi tendu et silencieux que moi ! J’aimerais me rapprocher de lui et le prendre dans mes bras, le rassurer…
Finalement nous arrivons à ces putains d’îles. Nous nous approchons d’une grande plage de sable blanc où sont ancrés quelques bateaux ! Des vrais, des hors bords, avec des gros moteurs…Ca et là cinq six groupes de personnes sous leurs parasols.
Je demande aux autres de rester près de la pirogue et je m’avance sur la plage, Detlef à côté de moi. Les gens nous regardent. C’est quoi ces trois blancs et ces deux africains sur cette méchante pirogue ? Nous nous approchons du groupe le plus proche de nous et je me lance ! Je me présente et je raconte ma petite histoire. Mon ami…est allemand…réfugié…a quitté l’ambassade…pas de papier…veut rejoindre l’ambassade de Rfa à Kinshasa. Pouvez-vous nous aider ? J’ai la bouche sèche et je ne suis pas sûr d’avoir été un bon avocat. C’est la surprise et le doute que je vois sur les visages de ces gens.
‘’ Il est en fuite ? Il a des problèmes avec la police ? C’est une histoire de drogue ?’’
C’est alors Detlef qui va s’expliquer. Un couple d’anglais ne parle pas français. Detlef va continuer dans leur langue. Dix minutes de questions réponses. Et l’anglais nous dit :
‘’C’est bon, j’ai compris. Nous connaissons bien l’attaché culturel à l’ambassade de Rfa (ah je savais que c’était la bonne personne à contacter…). Laissez-nous votre ami, on va s’en occuper.’’ Je devine que sa décision ne fait pas l’unanimité chez ses amis ! Et s’adressant à Detlef : ‘’Ayez confiance. Ce soir vous coucherez à l’ambassade.’’
Et à moi :
‘’ Où peut-on vous donner des nouvelles ?’’
Je donne mon nom et celui du magasin où je travaille.
‘’Je pense qu’ils vous préviendront par le biais de l’ambassade de Rfa à Brazza.’’
J’échange un regard avec Detlef. Son visage est figé. Je me demande s’ils se rendent compte que mes genoux tremblent. Un belge me dit :
‘’ Vous devriez partir maintenant. Il faut arriver à Brazza avant la nuit.’’
Je les ai tous remerciés un à un. Puis j’ai serré la main de Detlef en lui donnant une petite tape qui ressemblait à une caresse sur l’épaule à la base du cou.
'' Fais attention à toi. Donne vite de tes nouvelles''
'' Ne crais rien. J'ai confiance. Tout va aller bien.''
Je ne l'ai même pas embrassé.
Je suis remonté dans la pirogue. Je me suis retourné pour échanger un geste de la main avec lui. Puis une fois encore une minute après. Il était assis sur le sable et discutait avec les anglais.

dimanche 16 août 2015

L'homme de ma vie - 3



Le lendemain en arrivant au travail je tombe sur Christian, mon adjoint congolais. Il est jeune, astucieux et débrouillard. Je pense que je peux avoir confiance en lui. Je décide de lui parler. De toute façon je n’ai pas le choix. Seul, je ne peux rien faire. Je l’invite à déjeuner et je lui raconte mon histoire. Pas plus surpris que ça, il me dit :
‘’ J’ai un cousin, le fils de la petite sœur de mon père, il a un bateau. On peut pas traverser directement le Congo pour aller à Kinshasa. Mais il y a des iles un peu plus haut sur le fleuve où les expatriés de Kinshasa vont pique-niquer le dimanche. Il pourrait peut-être vous amener là ton ami et toi.’’
‘’Il connaît ces iles ton cousin ?’’
‘’Oui ! Il y va de temps en temps chercher du chanvre !’’
Ma bouchée de poulet au niembé se coince dans ma gorge.
‘’Et il a quoi comme bateau ?’’
‘’Une pirogue.’’
Décidément la bouchée ne passe pas.
‘’Mais avec un moteur.’’
Je déglutis.
‘’Je lui en parle ce soir. Je te donnerai sa réponse demain.’’

Mardi 22 avril 1975. Christian me donne la réponse de son petit cousin.
‘’C’est d’accord. Tu lui donnes 20000 francs CFA, le plein d’essence au départ et 20000 à l’arrivée et il vous emmène aux îles.’’ J’acquiesce.
‘’ Vous voulez partir quand ?’’
Le plus rapidement sera le mieux. Je dis, très vite :’’Dimanche.’’
‘’Il faudra partir tôt. 7h, ça ira ?’’
‘’Ça ira. Merci Christian.’’ Ma voix devait être blanche. Avec un grand sourire en me tapotant l’épaule :
‘’Ne t’inquiète pas Renaud. Tout va très bien marcher !’’
Et brusquement je me sens vidé, mou, plus d’énergie, presque chancelant. Cette histoire ne m’appartient plus. Elle ne dépend plus de moi ! Mais d’un petit revendeur de cannabis et de sa pirogue.
Je fais passer un petit mot à Detlef par notre petit ‘‘go-between’’ congolais. Je lui explique les grandes lignes de ce qui va se passer. Je reçois sa réponse le lendemain. On ne pourra se voir que vendredi. Il m’attendra à notre point de rendez-vous habituel à 20h.
Vendredi 25 avril. Detlef est à la maison depuis plus de deux heures. Nous avons peu parlé mais fait l’amour avec une grande intensité. L’heure tourne. Il devrait rentrer. Mais il reste là allongé près de moi sa tête sur mon épaule. Je sens quelque chose d’humide glisser à la base de mon cou. Il pleure. Je ne bouge surtout pas. Cet instant est quasi miraculeux.
Au bout d’un long moment il me dit :
‘’Je leur dirai que dimanche je vais passer la journée dans le village des parents d’un ami congolais. Ils ne s’inquièteront pas de mon absence avant 18 ou 19h. Mais je veux te voir demain. Encore une fois avant dimanche’’.
A suivre...

samedi 15 août 2015

une image, une seconde - Le livre de poche

Ma génération a appris ''à lire'' avec l'apparition du Livre de poche en 1953. Souvenirs... Ses cent premières couvertures.


vendredi 14 août 2015

L'homme de ma vie - 2



Ma vie a littéralement basculé une après-midi de mars 1975 sur une plage au bord du fleuve Congo.
J’avais rencontré Detlef 15 jours auparavant. J’en savais un peu plus sur lui. Il était allemand et travaillait comme interprète à l’ambassade de RDA à Brazzaville. A cette époque le mur de Berlin tenait encore solidement. Cela impliquait un contrôle permanent de ses allées et venues, la mise au coffre de l’ambassade de son passeport, l’interdiction de rencontrer des occidentaux. Ses relations ne pouvaient être que du personnel des ambassades des ‘’pays frères’’ ou des congolais. Cela ne facilitait pas nos rencontres. Nous nous étions revus. Un peu. Pas beaucoup. Furtivement. Difficilement. Quatre ou cinq fois j’avais été le chercher vers 20h dans les faubourgs de Brazzaville et je le ramenais chez moi caché sous une couverture sur la banquette arrière de la voiture. Je le ramenais là où je l’avais pris vers 23h. De là il prenait un taxi pour rentrer chez son ‘’chef’’ où il habitait.
Je ne m’étais pas remis du choc de notre rencontre. Lui non plus. Et ces rencontres furtives et romanesques n’atténuaient pas la passion que je sentais monter en moi. Je n’avais jamais ressenti quelque chose qui approchât la violence de ce sentiment. J’avais 30 ans ! C’’était comme l’explosion d’un printemps tardif.
J’étais à Brazza pour un remplacement de 3 mois et je devais repartir au Gabon, à Port-Gentil, un mois plus tard. Je ne pouvais pas imaginer une séparation. Je n’en dormais plus et dans mes insomnies j’avais imaginé une solution dont je ne voyais pas le côté insensé.
Ce dimanche-là j’avais été le chercher discrètement et je l’avais emmené sur cette petite plage sur les bords du Congo. Il n’y avait personne et j’avais besoin de lui parler. Cela tenait en peu de mots.
‘’Je repars dans un mois à Port-Gentil. Je ne peux pas envisager de te quitter. Voilà ce que je te propose. Je démissionne et tu viens avec moi en France’’.
En voyant la tête de Detlef, je découvre l’énormité de ce que je viens de dire.
‘’Tu te rends compte de ce que tu veux faire ?’’ Sa voix tremblait.
‘’Oui’’ !
L’assurance de ma voix tentait de cacher le bouillonnement de mon sang dans mes veines et de mes pensées.
‘’Il faut que je réfléchisse’’. Son visage s’était refermé. Son regard soudain vide semblait tourné vers l’intérieur. Pour la première fois je remarquais chez lui, malgré sa jeunesse, vingt ans, et une apparente fragilité physique, une force et une volonté insoupçonnées. Il s’est éloigné d’une vingtaine de mètres. Il s’est assis au bord du fleuve, le regard fixé sur le courant, les mains fouillant le sable noir. Au bout de quinze minutes il est revenu vers moi. Le visage apaisé, les yeux brillants. Il avait pleuré.
‘’Je pars avec toi Renaud’’
Nous sommes tombés dans les bras l’un de l’autre. Je n’ai plus jamais ressenti une émotion d’une telle intensité.
Il s’est légèrement écarté de moi :’’ Ça va être difficile Renaud. Tu sais comment on va faire ?’’
‘’Oui’’ ! Ce fut à son égard mon premier mensonge !
Les mots, une fois prononcés, ont une toute autre épaisseur qu’une histoire imaginée dans une nuit sans sommeil. Partir ? Oui ! Mais où, quand, comment ? Je me rendais compte de l’effet dévastateur et des conséquences d’un coup de foudre au détour d’une gondole de supermarché et d’une après-midi romantique au bord du Congo. J’avais trois semaines devant moi. J’étais à la fois angoissé et déterminé. Pour la première fois de ma vie je me sentais ‘’engagé’’ vis-à-vis de quelqu’un. Jusque-là je m’étais laissé porter par les évènements. Même mon départ pour l’Afrique s’était fait sans vraiment que je m’en rende compte. Il avait suffi d’un CV envoyé un matin sur un coup de colère à une société et tout s’était fait en deux mois. Mais là, j’étais responsable d’une décision qui n’engageait pas que moi. L’idée d’un échec m’était insupportable.
Très vite je me suis rendu compte de la difficulté de l’entreprise. Le faire partir comment ? Par avion ! Pas possible avec un passeport enfermé dans le coffre de l’ambassade. Par la route, vers le Gabon ? Je me voyais mal faire plus de mille kilomètres de piste à travers la forêt et passer une frontière en fraude. Qui nous conduirait ? Car dans cette hypothèse il était hors de question que je le laisse partir seul ? Et une fois arrivé, si on y arrivait, à Port-Gentil, je me pointais dans ma boite et je disais à mon patron : ’’ Bonjour, j’ai quitté mon poste à Brazza il y a trois jours. Je suis ici avec mon ami est-allemand. Il faut lui faire prendre l’avion pour Paris, mais il n’a pas de passeport…’’ je préférais ne pas y penser.
J’en parlais avec Detlef quand on pouvait se voir. Il me remontait le moral. Dans sa tête, une fois sa décision prise, il était déjà parti. Il me demandait de lui parler de Paris, des magasins où on trouvait tout et n’importe quoi, de la vie gay, de l’appartement où on vivrait, du travail qu’il pourrait trouver… Mais il avait parfois du mal à cacher son angoisse, si on ne réussissait pas, et sa tristesse, si on y arrivait, à la pensée qu’il quittait tout sa vie, son pays, son histoire, ses amis, sa famille, sa mère surtout qu’il ne pouvait pas prévenir et qui ne comprendrait pas. ‘’ Et puis tu sais Renaud, je partirai uniquement avec ce que j’ai sur le dos. Si je prépare la plus petite valise, ‘’ma ‘’famille’’ s’en apercevra et me posera des questions…’’
Il fallait trouver vite une solution. Je téléphonais à l’ambassade de France et demandais à parler à un conseiller. ‘’Lequel ?’’ ‘’Culturel’’. Il me semblait le plus à même de comprendre mon problème. Mon histoire racontée, je lui demandais ce qu’il pouvait faire.
‘’Rien.’’ Son visage s’était fermé. ’’Et je vous conseille d’en faire autant. La république du Congo est un régime socialiste. Nous avons avec elle des relations difficiles et il est hors de question qu’on se mouille pour un gamin de vingt qui veut passer à l’Ouest pour des convenances personnelles…. Retournez à votre travail et oubliez tout ça. C’est le conseil, très ferme, de votre ambassade.’’
Découragé, mais têtu et poussé par l’urgence, et un peu le désespoir, je tentais la même démarche auprès d’un conseiller de l’ambassade de l’Allemagne de l’ouest. L’accueil fut beaucoup plus chaleureux. On voyait qu’il était sensibilisé par ce genre de situation. Et s’il avait deviné nos motivations cela n’avait pas l’air de le choquer et il n’en parlât pas.
‘’Mais je ne peux pas faire grand’ chose pour vous. Nous avons eu le même problème il y a deux ans. Nous avons accueilli à l’ambassade un réfugié d’Allemagne de l’est. On a eu toutes les difficultés à le faire sortir du pays au bout de six mois. Et je ne pense pas que notre ambassadeur ait envie de recommencer l’expérience…’’
J’ai dû nettement marquer le coup.
‘’Mais si vous voulez vraiment tenter le coup, il y a peut-être une solution. Vous pouvez essayer de faire passer votre ami en face à Kinshasa et de le faire conduire une fois là-bas à notre ambassade. Ils n’ont pas le même problème que nous avec leurs congolais. Il suffit de traverser le fleuve, Kinshasa est à deux kilomètres. Juste en face de Brazzaville. Mais faîtes attention, les relations sont rompues entre les deux Congo et des navires militaires patrouillent en permanence. Si vous vous faites prendre, pour vous c’est l’expulsion immédiate et probablement la perte de votre travail. Ce n’est pas trop grave. Mais pour votre ami c’est une vie difficile qui l’attendra en RDA.’’
Le soir même, je pouvais voir Detlef pour deux petites heures. Je lui racontais ces entretiens.
Sa réaction fut immédiate et catégorique.
‘’Il faut le faire, Renaud. Je suis prêt. Il faut le faire !’’
Dimanche soir. Il est un peu plus de 22h. Je viens de déposer Detlef à un taxi qui va le ramener dans sa ‘’famille’’. Je rentre chez moi par la route du port, le long du fleuve. Je vois les lumières de Kinshasa. Si proches, si lointaines. Un saut de puce ! Deux kilomètres !! Trois fois rien !!! Le courant est fort le long de la rive et semble tumultueux dès qu’on s’en éloigne. Voilà ! A défaut de la solution, j’ai une solution. Il suffit de traverser. Il ne manque plus qu’un passeur, un bateau et un point de chute de l’autre côté.
A suivre...

mercredi 12 août 2015

L'homme ma vie - 1

Le ciel bas et lourd pesait sur Brazzaville. L'air avait une couleur. Une couleur de nuit en plein jour,  violet sombre presque noir. On voyait à peine Kinshasa de l'autre coté du Congo à près d'un kilomètre de là. Le fleuve charriait, renversé, le reflet noir des nuages. De temps en temps un flash blanc les éclairait de l'intérieur comme en ombre chinoise. Ils prenaient alors une profondeur inquiétante comme si ils avaient recouvert la terre entière. Un léger grondement annonçait l'approche d' un beau ''son et lumière'' équatorial.
C'était un samedi après midi de mars 1975. Je traînais dans les allées du supermarché de Brazza. J'y occupais la responsabilité de chef de rayon ''Bazar''. Quel programme!
Ca va péter, me dit Christian.
Christian était un congolais d'une trentaine d'années, mon second, qui était destiné, à terme, à occuper mon poste dans le cadre de la ''congolisation'' des cadres.
Et ça a brusquement pété. Une lumière blanche, métallique et dans le même moment un fracas brutal, sec, propre, net, sans bavure. J'ai sursauté, je me suis retourné. Un deuxième éclair de feu celui-là et silencieux pour tout autre que moi m'a frappé. Je venais de tomber nez à nez, les yeux dans les yeux, sur lui. A un mètre de moi. Et l'orage a éclaté!
Il semblait aussi pétrifié que moi. Et ce fut soudain comme une évidence, tout fut dit dans ce regard, en un instant. Tout ce que je croyais enfoui au fond de moi, tout ce que je ne voulais pas montrer, tout ce que je voulais taire avait volé en éclats. En un millième de seconde il avait tout vu, tout compris. Et il savait que je le savais. Et je savais qu'il savait que je le savais. J'essayais un sourire douloureux, muscles tétanisés. Les jambes molles, je fis un pas à gauche pour le laisser passer, il fit un pas à droite. Je fis un pas à droite, il fit le même à gauche. Il sourit. ''Excusez-moi, allez-y.'' Il avait un léger accent. Ce fut comme si le monde recommençait à tourner. Les gens se remirent à marcher. Il me dépassa pour poursuivre ses achats, son panier à la main. Dix secondes après, je me retournais. Je le vis se retourner aussi, un sourire dans l’œil et sous sa petite moustache. Je restais là les bras ballants. Christian ne s'était aperçu de rien. Ça n'avait pas duré 10 secondes. La pluie tombait à torrent et faisait un vacarme infernal sur le toit du supermarché. Mais on savait que cela ne durerait pas très longtemps.
Je voulais essayer de le suivre dans le magasin. C'est ce que j'aurais fait quelques années plus tard. Mais là...Je préférais m'approcher des caisses. Il allait bien finir par passer par là. Quinze minutes après il était là. Je me reculais un peu derrière une gondole. Je ne voulais pas qu'il me remarque le regardant. Il devait mesurer 1,75 mètre environ. Plus fin que réellement mince. Des cheveux châtains foncés avec des pattes fournies sur les oreilles, des yeux, que je saurai être verts un peu plus tard, frangés de longs cils sous d'épais sourcils, une moustache qui ne couvrait pas la lèvre supérieure. Quand il avait souri j'avais remarqué que son sourire remontait haut sur des dents très blanches et assez grandes. Il avait un nez très fin, curieusement terminé par une petite boule. Le tout dans un visage ovale ombré d'une barbe de 2 ou 3 jours. Bref, il était magnifique puisqu'il m'avait ébloui. Il était vêtu d'un vilain pantalon de toile et d'une chemisette passe partout.
Une fois ses achats payés il se dirigea vers la sortie. Il se retourna pour me chercher du regard. Je fis un pas en avant. Il me vit, sourit et partit en courant sous la pluie, la tête rentrée dans les épaules vers une voiture qui l'attendait. Et tout d'un coup je me suis senti seul comme un con.
Je savais qu'il venait de se passer quelque chose et je ne savais pas quoi faire. Pour la première fois j'étais touché au cœur et au ventre. Je connaissais mes goûts, mes affinités, mes inclinations. Mais je n'avais réglé mes problèmes ni avec le mot, ni avec la chose. La chose? J'avais eu quelques expériences en France. La dernière remontait à deux mois lors de mes derniers congés passés à Paris. Mais rien de bien satisfaisant!! Quant au mot? C'était l'innommable. Il l'était dans mon monde protégé et privilégié de Paris, il l'était encore plus dans ce microcosme de 300 à 400 expatriés où tout se savait, tout se disait; Mais là, il venait de se passer quelque chose de différent. Je n'étais déjà plus indemne. Je dormis mal cette nuit. Je me retournais dans mon lit. Je réfléchissais, incapable d'aligner deux pensées cohérentes. Je me levais le lendemain, épuisé et pas plus avancé.
A suivre...

vendredi 7 août 2015

Le cinéma c'est aussi de la musique - Maxence

Ça fait près de 50 ans qu'il cherche son idéal féminin, tout autant qu'il a été l'idéal masculin de beaucoup...
Depuis longtemps je regarde au moins une fois par an ''les demoiselles de Rochefort'' et le plaisir est intact. Le bonheur à l’état pur. L'émotion procurée par ce film me met quasiment en état de lévitation. Je nage dans une atmosphère de beauté et de félicite et pourtant j'en connais chaque image et chaque note de musique. Mais comment résister au charme des images et des mots de Jacques Demy, de la musique de Michel Legrand, au charme sucré de Catherine Deneuve, un peu acidulé de Françoise Dorléac et à la divine Danielle Darrieux lançant à l’ignoble Dutrouz (avec un z s'il vous plait) qui a découpé en morceaux cette pauvre Lola :'' La saaalaud !''...
Allez Maxence compte nous ta quête...
PS. J’espère simplement qu'à la fin Delphine monte bien dans le bon camion...

jeudi 6 août 2015

C'est quoi ça? Ithyphallophobie


L'ithyphallophobie est la peur de voir un (son) sexe en érection !!!
Y en a vraiment qui sont prêts à tout pour se rendre intéressants... Vous en connaissez beaucoup des ithyphallophobes? Moi pas. Ce serait plutôt le contraire...

J'ai voulu en savoir un peu plus et j'ai ouvert mon Robert historique de la langue française. Je suis tombé sur ''ithyphalle'' qui m'a renvoyé au mot ''phallus''
Phallus a remplacé entre le XVIème et XVIIème siècle, les mots fallot et phalle, formes francisées adaptées du grec et du latin. C'est un emprunt au latin phallus qui désignait la représentation du membre viril portée dans les fêtes de Bacchus; l'organe viril lui était désigné au moyen de fascinum (du groupe ayant donné fasciner. Je suis assez d'accord...), penis et pudenda ''parties honteuses'' (du groupe de pudeur. Gamin mon confesseur m'en parlait parfois...des parties honteuses...). Le mot latin est repris du grec phallos, lui-même très rarement employé avec son sens le plus ancien de ''pénis en érection''; presque toujours ce terme désigne une représentation matérielle du pénis érigé, notamment pour les fêtes de Dionysos. Le mot est d'origine populaire et on le rapproche d'un substantif d'origine thraco-phrygien. Vous ne voyez pas le rapport? Eh bien tous les deux se rattachent à un groupe étendu de mots indo-européens signifiant littéralement ''se gonfler''. Capito ?

En français, à partir du XVIIIème siècle, l'usage de phallus répond pour l'essentiel aux mêmes valeurs symboliques qu'en grec et en latin: il, je cite, ''désigne la représentation du sexe masculin en érection et , dans le cadre conceptuel de la psychanalyse freudienne, le pénis en tant que symbole ou objet partiel, défini par Lacan comme le signifiant du manque constituant de la condition structurale du désir''. Vous pouvez répéter s'i vous plait? Y a-t-il un lacanien dans la salle?? Quant à moi je ne pourrai plus jamais regarder mon zizi du même œil !!
Je passe sur tous les mots dérivés de phallus. Vous êtes peut-être un phalliste, un phallaciste , un phallocrate atteint de phallocentrisme, obsédé d'images phalliques ou collectionneur d'objets de forme phalloïde (les amateurs de champignons attention..)
Et j'en arrive à donc à ithyphalle. Mot composé de ithus ''droit en hauteur'' et de phallos.Vous y ajoutez phobie (du grec phobos: panique, effroi, peur irraisonnée) et on se retrouve au point de départ. Etonnant non?...

mardi 4 août 2015

Les 50 meilleurs films ''noir'' US

Les 50 meilleurs films ''noir'' US des années 40/50 ?
Tout choix est arbitraire sans compter les oublis et omissions et le classement n'implique pas de préférence.
Cette vidéo est juste faite pour se souvenir et rêver.


A la fin du ''Faucon maltais'' un policier demande à Bogart en quoi cet oiseau est fait ? ''De l'étoffe dont les rêves sont faits...''
Pour poursuivre son rêve un américain a acheté dans une vente aux enchères cette figurine de plomb de 46 kilos et 12 cms de haut pour 3,5 millions de $...


dimanche 2 août 2015

Images indélébiles - River of no return

Nous sommes de la matière dont nos rêves sont faits.
Certaines images sont plus indélébiles que d'autres...