samedi 18 mai 2019

Les rois maudits - La louve de France - 2ème partie - Isabelle aux amours - ch 2 La pénitence est pour le pape


II 
LA PÉNITENCE EST POUR LE SAINT-PÈRE 



  — Péchés de chair ? Certainement, puisque vous êtes homme… Péchés de gourmandise ? Il suffit de vous voir ; vous êtes gras… Péchés d’orgueil ? Vous êtes grand seigneur… Mais votre état même vous oblige à l’assiduité dans vos dévotions ; donc tous ces péchés, qui sont le fonds commun de l’humaine nature, vous vous en accusez et en êtes absous aussi souvent que vous vous approchez de la sainte table.     
  Étrange confession où le premier vicaire de l’Église romaine prononçait tout ensemble les questions et les réponses. Sa voix feutrée était parfois couverte par des cris d’oiseaux, car le pape avait dans sa chambre un perroquet enchaîné et, voletant sous une grande cage, des perruches, des serins, et de ces petits oiseaux des îles, rouges, qu’on appelle cardinaux. Le sol de la pièce, dallé de carreaux peints, disparaissait en partie sous des tapis d’Espagne. Les murs et les sièges étaient tendus de vert et les courtines du lit, les rideaux des fenêtres également faits de lin vert. Sur cette couleur de forêt, les oiseaux vivants mettaient des taches colorées, comme des fleurs. Un angle formait salle de bains, avec une baignoire de marbre. Dans la garde-robe, attenante à la chambre, manteaux blancs, camails grenats et ornements sacerdotaux emplissaient de vastes penderies. 
  Le gros Bouville, en entrant, avait eu un mouvement pour s’agenouiller ; mais le Saint-Père, très simplement, l’avait fait asseoir auprès de lui dans un des fauteuils verts. On ne pouvait, en vérité, traiter un pénitent avec plus d’égards. L’ancien chambellan de Philippe le Bel en était tout abasourdi, et rassuré à la fois, car il avait appréhendé vraiment d’avoir à confesser, lui grand dignitaire, et au souverain pontife, toutes les poussières d’une vie, toutes les petites scories, les mauvais désirs, les vilaines actions, toute la lie qui tombe au fond de l’âme avec les jours et les ans. Or, ces péchés-là, le Saint-Père semblait les tenir pour broutilles ou, tout au moins, pour être du ressort de plus humbles prêtres. 
  Mais Bouville n’avait pas remarqué, en sortant de table, le regard échangé entre les cardinaux Gaucelin Duèze, du Pouget, et le « cardinal blanc ». Ceux-là connaissaient bien cette ruse habituelle du pape Jean : la confession postprandiale, dont il se servait pour s’entretenir vraiment seul à seul avec un interlocuteur important, et qui lui permettait d’être éclairé sur des secrets d’État. Qui pouvait résister à cette offre abrupte, aussi flatteuse que terrifiante ? Tout s’unissait pour amollir les consciences, à la fois la surprise, la crainte religieuse et une digestion commençante. 
  — L’essentiel pour un homme, reprit le pape, est d’avoir bien rempli l’état particulier où Dieu l’a placé en ce monde, et c’est en ce domaine que les fautes lui sont comptées le plus sévèrement. Vous avez été, mon fils, chambellan d’un roi et chargé, sous trois autres, des plus hautes missions. Avez-vous toujours été bien exact en l’accomplissement de ces devoirs ?   
  — Je pense, mon Père, Très Saint-Père, veux-je dire, m’être acquitté de mes tâches avec zèle, avoir été, autant que je l’ai pu, loyal serviteur de mes suzerains… 
  Il s’interrompit brusquement, se rendant compte qu’il n’était pas là pour prononcer son propre éloge. Il se reprit, et changeant de ton : 
  — Je dois m’accuser d’avoir échoué en certaines missions que j’aurais pu mener à bien… Voilà, Très Saint-Père : je n’ai pas eu toujours l’esprit assez délié et me suis parfois aperçu trop tard d’erreurs que j’avais commises. 
  — Ce n’est pas un péché que d’avoir quelque retard dans la cervelle ; cela nous peut venir à tous et c’est justement le contraire de l’esprit de malice. Mais avez-vous commis en vos missions, ou à la suite d’elles, des fautes graves telles que faux témoignage… homicide… 
  Bouville secoua la tête, de droite à gauche, d’un mouvement de dénégation. Mais les petits yeux gris, sans cils ni sourcils, tout brillants et lumineux dans le visage ridé, restaient fixement attachés sur lui.     
  — Êtes-vous bien certain ? Voici l’occasion, mon cher fils, de parfaitement vous purifier l’âme ! Faux témoignage, jamais ? demanda le pape. 
  Bouville, à nouveau, se sentit mal à l’aise. Que signifiait cette insistance ? Le perroquet eut un cri rauque, sur son perchoir, et Bouville sursauta. 
  — Une chose, à vrai dire, Très Saint-Père, m’alourdit l’âme, mais je ne sais si c’est vraiment un péché, ni quel nom de péché lui donner. Je n’ai pas commis l’homicide moi-même, je vous en assure, mais une fois je n’ai pas su l’empêcher. Et ensuite, j’ai dû porter faux témoignage ; mais je ne pouvais agir autrement. 
  — Contez-moi donc cela, messire comte, dit le pape. 
  Ce fut son tour de se reprendre : 
  — Confessez-moi ce secret qui tant vous pèse, mon cher fils ! 
  — Certes, il me pèse, dit Bouville, et plus encore depuis la mort de ma bonne épouse Marguerite, avec qui je le partageais. Et souvent je me répète que si je viens à mourir sans en avoir fait personne dépositaire… 
  Des larmes brusquement lui étaient venues. 
  — Comment n’ai-je pas songé plus tôt, Très Saint-Père, à vous le confier ?… Je vous le disais : j’ai la cervelle souvent lente… Ce fut après la mort du roi Louis Dixième, l’aîné fils de mon maître Philippe le Bel… 
  Bouville regarda le pape et se sentit comme déjà soulagé. Enfin il allait pouvoir se décharger l’âme de ce fardeau qu’il portait depuis huit années. Le pire moment de sa vie, à coup sûr, et dont le remords le poignait sans trêve. Que n’était-il pas venu plus tôt avouer tout cela au pape ! À présent Bouville parlait aisément. Il racontait comment, ayant été nommé curateur au ventre de la reine Clémence, après le trépas de Louis Hutin, il avait, lui Bouville, craint que la comtesse Mahaut d’Artois ne fit une criminelle entreprise et contre la reine et contre l’enfant qu’elle portait alors. En ce tempslà, Monseigneur Philippe de Poitiers, frère du roi décédé, réclamait la régence contre le comte de Valois et contre le duc de Bourgogne… 
  À ce souvenir, Jean XXII leva un instant les yeux vers les poutres peintes du plafond, et une expression songeuse passa sur son étroit visage. Il revit le matin de 1316, où lui-même, à Lyon, était venu annoncer à Philippe de Poitiers la mort de son frère Louis X, ayant appris la nouvelle justement de ce petit Lombard Baglioni… 
  Donc Bouville craignait un crime de la part de la comtesse d’Artois, un nouveau crime car on disait beaucoup qu’elle était l’auteur du trépas de Louis Hutin, par enherbement. Elle avait les meilleures raisons de le haïr, car il venait de lui confisquer son comté. Mais elle avait toutes bonnes raisons aussi, Louis disparu, de souhaiter que le comte de Poitiers, son gendre, accédât au trône. Le seul obstacle à cela était l’enfant que portait la reine, qui naquit et qui fut un mâle. 
  — Infortunée reine Clémence… dit le pape. Mahaut d’Artois, choisie comme marraine, devait à ce titre amener le nouveau petit roi aux barons, lors de la cérémonie de présentation. 
  Bouville était sûr, et madame de Bouville autant que lui, que si la terrible Mahaut voulait perpétrer un forfait, elle n’hésiterait pas à le faire pendant la présentation, seule occasion pour elle de tenir l’enfant. Bouville et sa femme avaient donc décidé de cacher l’enfant royal pendant ces heures-là, et de remettre à sa place dans les bras de Mahaut le fils d’une nourrice qui n’avait que quelques jours de plus. Sous les langes d’apparat, personne ne pourrait s’apercevoir de la substitution, puisque nul n’avait encore vu l’enfant de la reine Clémence et pas même celle-ci, atteinte de grande fièvre et presque mourante. 
  — Et puis en effet, Très Saint-Père, dit Bouville, l’enfant que j’avais remis la comtesse Mahaut et qui se portait à merveille l’heure d’avant, mourut en quelques instants devant tous les barons. C’est cette petite créature innocente que j’ai livrée au trépas. Et le crime s’accomplit si vite, et j’étais si troublé, que je n’ai pas songé à crier aussitôt : « Cet enfant n’est pas le roi ! » 
  Et après, ce fut trop tard. Comment expliquer… Le pape, un peu penché en avant et les mains jointes sur sa robe, ne perdait pas un mot du récit. 
  — Alors l’autre enfant, le petit roi, qu’est-il devenu, Bouville ? Qu’en avez-vous fait ? 
  — Il existe, Très Saint-Père, il vit. Nous l’avons, ma défunte femme et moi, confié à la nourrice. Oh ! avec bien de la peine. Car la malheureuse nous haïssait, vous le pensez bien, et gémissait de douleur. À force de supplications, de menaces aussi, nous lui avons fait jurer sur les Évangiles de garder le petit roi comme s’il était son enfant, et de ne jamais rien révéler à qui que ce fût, même en confession. 
  — Oh, oh… murmura le Saint-Père. 
  — Si bien que le petit roi Jean, le vrai roi de France en somme, est élevé présentement dans un manoir d’Ile-de-France, sans qu’il sache qui il est, sans que personne le sache, à part cette femme qu’on croit sa mère… et moi-même. 
  — Et cette femme ?… 
  — … est Marie de Cressay, l’épouse du jeune Lombard Guccio Baglioni. 
  Tout s’éclairait maintenant pour le pape. 
  — Et Baglioni, lui, ignore tout ? 
  — Tout, j’en suis assuré, Très Saint-Père. Car la dame de Cressay, pour garder son serment, a refusé de le revoir, ainsi que nous le lui avions ordonné. Le garçon est reparti tout aussitôt pour l’Italie. Il pense que son fils est vivant. Il s’en inquiète parfois dans ses lettres à son oncle, le banquier Tolomei… 
  — Mais pourquoi, Bouville, pourquoi, puisque vous aviez la preuve du crime, et combien facile à administrer, n’avez-vous pas dénoncé la comtesse Mahaut ?… Quand je songe, ajouta le pape Jean, que dans le même temps elle m’envoyait son chancelier afin que je soutienne sa cause contre son neveu Robert… 
  Le pape pensait soudain que Robert d’Artois, ce géant tapageur, ce semeur de brouilles, cet assassin sans doute, lui aussi – car il semblait bien qu’il eût trempé dans le meurtre de Marguerite de Bourgogne, à Château-Gaillard – ce terrible baron, valait peut-être mieux, à tout prendre, que sa cruelle tante, et qu’en luttant contre elle, il n’avait probablement pas tous les torts de son côté. 
  Un monde de grands loups que celui des cours souveraines ! Et dans chaque royaume, il en allait de même. Était-ce pour gouverner, apaiser, conduire ce troupeau de fauves que Dieu lui avait inspiré, à lui chétif petit bourgeois de Cahors, l’ambition d’une tiare dont il était à présent coiffé et qui, par moments, lui pesait un peu ?… 
  — Je me suis tu, Très Saint-Père, reprit Bouville, par le conseil surtout de ma défunte épouse. Comme j’avais manqué le bon instant de confondre la meurtrière, mon épouse m’a représenté avec justesse que si nous révélions la vérité, Mahaut s’acharnerait sur le petit roi, et sur nous-mêmes. Il fallait lui laisser croire que son crime avait réussi.      
  Ce fut donc l’enfant de la nourrice qu’on inhuma à Saint-Denis parmi les rois. Le pape réfléchissait. 
  — Ainsi, dans le procès fait à Madame Mahaut l’année suivante, les accusations étaient fondées ? dit-il. 
  — Certes, certes, elles l’étaient ! Monseigneur Robert avait pu mettre la main sur une empoisonneuse, une nécromancienne, nommée Isabelle de Fériennes, qui avait livré à une demoiselle de parage de la comtesse Mahaut le poison dont celle-ci tua d’abord le roi Louis, puis l’enfant présenté aux barons. Cette Isabelle de Fériennes, ainsi que son fils Jean, furent conduits à Paris pour y faire leurs aveux. Vous pensez comme cela servait bien Monseigneur Robert ! Leur déposition fut recueillie, et il apparut clairement qu’ils étaient les fournisseurs de la comtesse, car ils lui avaient déjà auparavant procuré le philtre par lequel elle se vantait d’avoir réconcilié sa fille Jeanne avec son gendre le comte de Poitiers… 
  — Magie, sorcellerie ! Vous pouviez bien faire griller la comtesse, chuchota le pape. 
  — Plus à ce moment, Très Saint-Père, plus à ce moment. Car le comte de Poitiers était devenu roi et protégeait beaucoup Madame Mahaut, si fort même que je suis assuré dans le fond de mon âme qu’il avait partie liée avec elle, au moins dans le second crime. 
  Le petit visage du pape se fripa davantage sous le bonnet fourré. Jean XXII aimait bien le roi Philippe V auquel il devait sa tiare, et avec lequel il s’était toujours parfaitement accordé pour toutes les questions de gouvernement. Les dernières paroles de Bouville le peinaient. 
  — Sur l’un et sur l’autre, le châtiment de Dieu s’est appesanti, reprit Bouville, puisqu’ils ont chacun perdu dans l’année leur unique héritier mâle. La comtesse a vu mourir son seul fils qui avait dix-sept ans. Et le jeune roi Philippe a été privé du sien, qui lui était né depuis seulement quelques mois ; et il n’en eut plus jamais d’autre… Mais pour l’accusation élevée contre elle, la comtesse sut se défendre. Elle invoqua l’irrégularité de la procédure engagée devant le Parlement, l’indignité de ses accusateurs, elle représenta que son rang de pair de France ne la rendait justiciable que de la Chambre des Barons. Toutefois, afin, disait-elle, de faire triompher son innocence, elle supplia son gendre… ce fut une belle scène de fausseté publique !… de poursuivre l’enquête et de lui donner moyen de confondre ses ennemis. La nécromancienne de Fériennes et son fils furent entendus à nouveau, mais après avoir subi la question. Leur état n’était pas beau, et le sang leur collait sur tout le corps. Ils se rétractèrent complètement, déclarèrent mensonges leurs aveux premiers et prétendirent qu’ils y avaient été conduits par caresses, prières, promesses et aussi violences de personnes dont, selon l’acte des greffiers, il convenait de taire le nom pour le moment. Puis le roi Philippe le Long tint lui-même lit de justice et fit comparaître tous ses proches et parents, et tous les familiers de feu son frère, le comte de Valois, le comte d’Évreux, Monseigneur de Bourbon, Monseigneur Gaucher le connétable, messire de Beaumont, le maître de l’hôtel, et la reine Clémence, elle-même, leur demandant, sous la foi du serment, s’ils savaient ou croyaient que le roi Louis et son fils Jean fussent morts autrement que de mort naturelle. Comme aucune preuve ne pouvait être produite, comme la séance avait lieu devant tous, et que la comtesse Mahaut se tenait assise à côté du roi, chacun déclara, bien que pour beaucoup ce fût à contre-conviction, que ces trépas étaient dus à l’œuvre de nature. 
  — Mais vous-même, vous avez eu à comparaître ?      
  Le gros Bouville baissa le front. 
  — J’ai porté faux témoignage, Très Saint-Père, dit-il. Mais que pouvais-je quand toute la cour, les pairs, les oncles du roi, les plus proches serviteurs, la reine veuve elle-même, certifiaient sous serment l’innocence de Madame Mahaut ? C’est moi qu’on eût alors accusé de mensonge et de fable ; et l’on m’eût envoyé me balancer à Montfaucon. 
  Il semblait si malheureux, si abattu, si triste, que l’on imaginait soudain, sur son gros visage charnu, les traits du petit garçon qu’il avait été un demi-siècle plus tôt. Le pape eut un mouvement de pitié. 
  — Apaisez-vous, Bouville, dit-il en se penchant et en lui mettant la main sur l’épaule. Et ne vous reprochez pas d’avoir mal agi. Dieu vous avait posé un problème un peu lourd pour vous. Votre secret, je le prends à mon compte. L’avenir dira si vous avez bien fait ! Vous avez voulu sauver une vie qui vous avait été confiée par le devoir de votre état, et vous l’avez sauvée. Combien en auriez-vous exposé d’autres, si vous aviez parlé ! 
  — Ah ! Très Saint-Père, oui, je suis apaisé ! dit l’ancien chambellan. Mais le petit roi caché, que va-t-il devenir ? Que faut-il en faire ? 
  — Attendez sans rien changer. J’y penserai et vous le ferai savoir. Allez en paix, Bouville… Quant à Monseigneur de Valois, cent mille livres sont à lui mais pas un florin de plus. Qu’il me laisse en repos avec sa croisade, et qu’il s’accorde avec l’Angleterre.      
  Bouville mit genou en terre, porta la main du Saint-Père à ses lèvres, avec effusion, se releva et gagna la porte à reculons puisque l’audience semblait terminée. Le pape le rappela du geste. 
   — Mon fils, et votre absolution ? Vous ne la voulez donc point ? 
  Un moment plus tard le pape Jean, demeuré seul, parcourait à petits pas glissants son cabinet de travail. Le vent du Rhône passait sous les portes et gémissait à travers le beau palais neuf. Les perruches pépiaient dans leur cage. Les tisons du brasero s’assombrissaient. Jean XXII réfléchissait au difficile problème, à la fois de conscience et d’État, qui se posait à lui. L’héritier véritable de la couronne de France était un enfant ignoré, caché dans une cour de ferme. Deux personnes seulement au monde, ou plutôt trois personnes à présent, le savaient. La peur retenait les deux premières de parler. Que convenait-il de faire, quel parti prendre, quand deux rois déjà, depuis la naissance de cet enfant, s’étaient succédé au trône, deux rois dûment sacrés, oints du saint chrême ? Révéler l’affaire et jeter la France dans le plus terrible désordre dynastique ? De la semence de guerre, encore ! 
  Un autre sentiment également incitait le pape à garder le silence, et ce sentiment concernait la mémoire du roi Philippe le Long. Oui, Jean XXII l’avait bien aimé, ce jeune homme, et l’avait aidé de toutes les façons possibles. C’était même le seul souverain qu’il eût jamais admiré et auquel il gardât reconnaissance. Ternir son souvenir revenait pour Jean XXII à se ternir lui-même ; car, sans Philippe le Long, fût-il jamais devenu pape ? Et voilà que Philippe se révélait avoir été un criminel, le complice d’une criminelle tout au moins… Mais était-ce au pape Jean, était-ce à Jacques Duèze, de jeter la première pierre, lui qui devait à de si grosses fourberies et sa pourpre et sa tiare ? Et s’il lui avait été absolument nécessaire, pour assurer son élection, de laisser commettre un meurtre… « Seigneur, Seigneur, merci de m’avoir épargné pareille tentation… Mais était-ce bien moi qui devais être chargé du soin de vos créatures ?… Et si la nourrice parle un jour, qu’arrivera-t-il ? Peut-on se fier à langue de femme ? Il serait bon, Seigneur, que vous m’éclairiez quelquefois ! J’ai absous Bouville, mais la pénitence est pour moi. » 
  Il s’était agenouillé sur le coussin vert de son prie-Dieu ; il demeura là, longtemps, ses mains maigres enserrant son petit front ridé.
Demain ‘’La Louve de France’’ 2ème partie – ch 3 ‘’Le chemin de Paris’’.

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