samedi 9 novembre 2019

Anagrammes ou le sens caché du monde 3

 
Dès son origine, l’anagramme fut un moyen d’interroger les noms mais aussi les préceptes des livres sacrés. La kabbale en fit grand usage, prêtant à cet art des vertus révélatrices. Le monde pouvait accoucher d’un démon.
Aux XVIe et XVIIe siècles, ce jeu savant s’immisça dans les cours d’Europe. Entre gens lettrés et courtois, il était de bon ton de trouver dans un nom propre une flatterie délicate ou une maligne satire. Thomas Billon, gentilhomme provençal, fut un fameux anagrammatiste. Il eut de Louis XIII une pension de douze cents livres pour amuser la Cour. 
Sa gloire dura sans échec jusqu’à ce que le poète Colletet y vînt porter atteinte par une moquerie, tenant « que tous ces renverseurs de noms ont la cervelle renversée ». Hélas, la sienne était trop bien d’aplomb ; l’histoire l’oublia. 
Galilée, quant à lui, communiquait sous forme d’anagrammes certaines de ses découvertes ; c’était là un moyen de s’assurer la priorité de ses observations tout en les entourant de mystère. Enfin, la coutume s’établit, pour les écrivains et les artistes, de signer leurs œuvres par l’anagramme de leur nom. Alors, l’anagramme ? Art divinatoire ? Art du compliment ? de la satire ? du secret ? En tout cas, une fiole de folie, c’est certain.
L’anagramme consiste à mélanger les lettres d’un mot, d’une expression, en vue de former un nouveau mot, une nouvelle expression. C’est ainsi que les tripes ne sont pas sans esprit, les morues sans mœurs, le pirate sans patrie, le sportif sans profits et l’étreinte sans éternité.
Les mots ont-ils leur propre vie, un sens caché qui pourraient nous révéler la vérité des choses. De renversantes les anagrammes peuvent devenir époustouflantes...
Les mots se joueraient-ils de nous ?

La vitesse de la lumière
La vitesse d’une particule dans le vide est toujours comprise entre zéro – la particule est alors immobile – et 299 792 458 m/s, la vitesse de la lumière, qui ne saurait être dépassée sans que cela contredise formellement les équations d’Einstein. Cette constante universelle de la physique
limite les rêves au-delà.
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Miguel de Cervantès Saavedra
Et Sancho allait cheminant et mangeant derrière son maître don Quichotte, très confortablement, et de temps à autre il levait sa gourde avec tant de plaisir que le plus raffiné des gargotiers de Málaga aurait pu l’envier. Et du moment qu’il allait ainsi multipliant les gorgées, il considérait comme de tout repos d’aller à la recherche des aventures, si dangereuses soient-elles », et
de cavaler au vent des mirages.
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Léonard de Vinci
La perfection n’appartient qu’à Dieu, vous diront les meilleurs tisserands musulmans. C’est pour cela qu’ils laissent toujours un petit défaut dans leurs œuvres. Léonard, lui, ne l’entend pas de cette oreille. Chaque fois qu’il éprouve une curiosité, un intérêt, ça prend tout de suite les allures d’une folle passion. Plus rien ne compte, il suspend toute autre activité et n’a de cesse d’acquérir la plus grande maîtrise possible de sa nouvelle lubie. « Dites-moi, dites-moi, a-t-on jamais terminé quoi que ce soit ? » consigne-t-il dans ses carnets. Il déteste peindre à fresque, vite, sans repentir. Il se livre à des recherches infinies. Soif d’innover. Besoin de reconnaissance aussi. Beau comme un débauché, doué comme un diable, Léonard est blessé par le mépris où le tient sa ville, Florence. Oh, tous s’accordent à lui trouver du génie, mais à condition qu’il ne fasse pas autre chose que ce pour quoi on lui a passé commande. Du génie, à condition qu’il redevienne mortel !
Le don divin créa.
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Le sourire de Monna Lisa
Le soir donna sa lumière.
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Les Liaisons dangereuses
L’histoire d’un être, serpent devant l’Éternel, pris au piège de l’amour qu’il voulait feindre. Un moment-clé, lettre XXIII : le vicomte de Valmont voit à travers la serrure sa proie « adorable », Mme de Tourvel, à genoux, baignée de larmes, et priant avec ferveur. Quel dieu ose-t-elle invoquer ? En est-il d’assez puissant contre l’amour ? Et quelle est donc sa faiblesse à lui si, oubliant ses projets, il n’a d’autre plaisir que celui de considérer à loisir l’exemple de la candeur ? Cette nuit-là, Valmont dort mal. Il aperçoit le point du jour, espère que la fraîcheur qui l’accompagne lui amènera le sommeil. Mais il n’est pas de repos possible. Elles se sont refermées sur lui,
les ailes sanguines d’Éros.

2 commentaires:

  1. Merci de ta littéraire visite ...comme on dirait en franglais !

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  2. ce fut une découverte. je t'ajoute sur ma liste de blogs

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