Quelques amis qui m'ont suivi tout au long de ma vie...
JAMBIER
: (charcutier) 45 rue Poliveau, Paris 15ème.
Spécialiste
du porc en 41/44. Il a bien connu le couple Poissonnard qui tenait à
cette époque une crèmerie ‘’Au bon beurre’’ dans le 11ème.
A leur exemple, au lendemain de la guerre, il a étendu son activité
à ‘’beurre, œufs, fromages’’… Mais à la libération les
deux couples ne se fréquentaient plus. Fortune faite, il y a des
souvenirs qu’il vaut mieux oublier…
HOLMES,
Mycroft : Diogenes Club, 90 Pall Mall, London.
J’appréciais
d’aller voir Mycroft dans son club, le plus silencieux de Londres.
Il était interdit d’y prononcer le moindre mot. Les conversations,
le plus souvent monosyllabiques se faisaient dans la salle des
Etrangers. Je préférais de loin Mycroft à son frère Sherlock. Je
l’avais rencontré une fois dans son bureau enfumé de Baker
Street. De ses yeux injectés de sang il m’avait scruté pendant
une petite minute. Un vrai scalpel ! Puis, ne m’ayant probablement
rien trouvé de mystérieux il s’était détourné de moi. J’avais
ressenti de sa part comme un profond dédain devant ma médiocre
normalité…
Lors
de mes visites à Mycroft, je poussais un peu pour aller voir mon ami
:
FOGG,
Philéas. Gentleman. Reform Club, 104 Pall Mall, London.
Il
ressemblait un peu à Lord Byron. Côté visage, car côté pied tout
était normal. Je me souviens de son pari insensé et de l’intérêt
avec lequel nous suivions les étapes de son aventure. Ce fut une
quasi émeute quand il fit son entrée 80 jours plus tard dans le
grand salon du club et de l’incroyable scandale qui suivit quand la
princesse indienne Aouda qu’il avait sauvée du bûcher et qui
était devenue sa femme était entrée à son bras ! James, le vieux
maître d’hôtel qui était à l’époque un tout jeune groom,
s’en souvient encore avec horreur. Et, en son for intérieur, il a
été contre la décision des membres du club d’accepter les femmes
en…1981.
MADRIGAL,
Anna (Agricultrice). 28 Barbary Lane, San Francisco.
J’aimais
bien lui rendre visite dans son petit immeuble à flanc de coteau
surplombant San Francisco. Elle en louait les chambres. Les
formalités d’inscription étaient simples. Une petite discussion
dans son salon en fumant une cigarette aux plantes qu’elle
cultivait sur son balcon. Si vous lui plaisiez, l’affaire était
faite. Son locataire préféré était le beau Michael Tolliver. Tout
le monde était plus ou moins amoureux de lui ! Mais lui ne cherchait
que l’homme de sa vie ! Elle était la confidente de tous les
secrets de ses locataires. Mais le plus gros secret était le sien !
Il m’a fallu des années pour me rendre compte qu’Anna Madrigal
était l’anagramme de « A man and a girl »… Je suis retourné à
Barbary Lane il y a peu. J’aurais pas dû. Faut pas toucher à
certains souvenirs.
SEUREL,
François. Instituteur. Ecole de garçons de Ste Agathe. Sologne.
Quand
je l’ai rencontré je devais avoir comme lui une quinzaine d’années
et j’étais comme lui fasciné par la personnalité du grand
Augustin. J’ai suivi avec lui Meaulnes dans sa quête du domaine
perdu et de l’amour entrevu. Après la mort d’Yvonne de Galais,
c’est par lui que j’ai essayé d’avoir des nouvelles d’Augustin
et de sa fille et surtout du frère d’Yvonne, Frantz qui par sa
beauté et son romantisme échevelé a toujours été un peu mon
favori… Mes relations avec François se sont un peu distendues à
la fin de l’adolescence. Mais je regrette parfois un peu les
émotions de cette époque.
ELISE.
J’ai
perdu son adresse. Qui peut me renseigner ? J’ai toujours une
lettre pour elle.
M.
Directeur du MI6. 85 Embarkment, Vauxhall Cross, London.
Son
accès m’est devenu plus difficile quand j’ai perdu mon double
zéro. Je passai à l’époque par la délicieuse Miss Moneypenny.
Il est aujourd’hui à la retraite, Moneypenny aussi. Il aurait été
remplacé par une femme. Je ne la connais pas et elle n’a jamais
fait appel à moi… Je garde l’adresse de M en souvenir du bon
vieux temps et j’ai toujours une Aston Martin d’occase dans mon
garage. Désarmée…
SAINT-LOUP,
Robert, marquis de. Hôtel de Marsantes Faubourg Saint-Germain,
Paris. 1er régiment de cavalerie, caserne de Doncières (Saint-Cyr).
Mission française au Maroc, Tanger. Château de Tansonville, Eure et
Loir.
Je
l’ai connu par le baron de Charlus dont il était le neveu par sa
mère et donc neveu également du duc et de la duchesse de
Guernantes. Bien que marié à Gilberte Swann, il sera le rival
heureux de son oncle dans le cœur et le lit de Charles Morel. Je
l’ai connu un peu. Il était très ‘’chic’’ comme on disait
à l’époque. Par sa façon de poser son chapeau par terre, au pied
de sa chaise, quand il arrivait quelque part. A cause aussi de son
impertinence de jeune lion. A cause surtout de son extraordinaire
beauté. Certains lui trouvaient même un air efféminé. Sa mort
héroïque au combat sera pleurée par tous.
VALDES
Paquita, aux bons soins de la marquise de San Réal, rue Saint
Lazare, hôtel de San Réal, Paris.
Je
l’ai connue, un peu, par mon ami Henri de Marsay, frère de la
marquise de San Réal. Je fus reçu à deux reprises dans l’hôtel
de la rue Saint Lazare qui était voisin de l’hôtel du baron de
Nucingen. Paquita était une splendide jeune fille créole et on ne
pouvait être que fasciné par ses grands yeux pailletés d’or qui
lui avaient valu le surnom de ‘’fille aux yeux d’or’’. Le
jeune dandy Henri de Marsay était immédiatement tombé follement
amoureux d’elle. C’était sans compter sans la marquise qui avait
ramené la jeune fille de La Havane et brûlait d’une passion
démesurée pour sa protégée. Le frère et la sœur se sont livrés
une lutte sans merci pour la possession de la jeune créole. Mais
devant l’inclination de Paquita pour Henri, la marquise préférera
la poignarder plutôt que de la laisser partir. Le scandale fut
énorme et la marquise partit, pour ne plus revenir, dans le couvent
de los Dolores de la Corogne. Quant à Henri de Marsay, il se consola
rapidement, devint un des dandy les plus en vue de Paris, amateur de
toutes les débauches.
SERNINE
Paul, 95 rue Charles Lafitte Neuilly sur Seine
Prince
Paul Sernine ! Quelle époque ! C’était une figure incontournable
du Tout-Paris. Il avait tout pour plaire. Grand, beau, athlétique,
brillant, richissime, amateur d’art éclairé, ses collections
éblouissaient ceux qui avaient la chance d’être invités chez
lui. Son charme, slave ?, ne laissait aucune femme insensible et tous
les hommes désiraient être son ami. Pour parfaire le tableau il
était auréolé de mystère. Il était brusquement apparu sur la
scène parisienne. Nul ne savait d’où il venait. Etait-il
réellement prince ? Etait-il seulement russe ?? Peu importait,
l’homme emportait tout dans son impétueux sillage. J’ai été
son ami pendant deux années, entrecoupées de disparitions
mystérieuses. Son hôtel particulier était alors fermé, seulement
gardé par un couple de concierges qui lui était dévoué corps et
âme. Certains laissaient entendre que la femme avait été sa
nourrice …
Un
matin que je lui rendais visite, je vis plusieurs fourgons de police
garés devant l’hôtel particulier. Je tentais de m’informer
quand un badaud me dit : ‘’ Paul Sernine, tu parles ! Y a pas de
Paul Sernine. C’est un anagramme. C’est Arsène Lupin. Mais il a
déjà filé. C’est pas demain la veille qu’il va le coincer ce
benêt de Ganimard’’. Et il partit d’un grand éclat de rire en
se tapant sur les cuisses. Moi j’en restai sur le fondement…
Quelques
mois plus tard on me présentait dans un salon un certain don Luis
Perenna. La poignée de main était amicale, le regard me rappelait
quelqu’un et je crus y déceler un imperceptible clin d’œil. Je
m’éloignais quand soudain : ’’ Luis Perenna, Arsène Lupin.
Non, il n’oserait pas…’’ Je me retournais vivement. Il avait
disparu. Mais quelle époque…
A suivre
Magie de la fiction. Ces personnages qui nous connaissent autant que nous les connaissons.
RépondreSupprimercela me donne des idées pour un ami / voisin qui a 50 ans et n'aimait pas lire mais qui se passionne pour la lecture depuis que je lui ai prêté un livre intitulé "Wonder" dont le héros August Pullman enfant au visage extraordinaire est devenu notre ami commun... Nous ne connaissons pas encore Anna Madrigal mais elle a l'air fascinant !! ...
RépondreSupprimerIl faut ABSOLUMENT que tu lises ''Les Chroniques de San Francisco'' c'est en 10/18 tu devrais adorer
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