II
LE
LOMBARD DU PAPE
À
Lyon, les cardinaux étaient toujours enfermés. Ils avaient cru
lasser le régent ; leur réclusion durait depuis un mois. Les sept
cents hommes d’armes du comte de Forez continuaient de monter la
garde autour de l’église et du couvent des Frères Prêcheurs ; et
si, pour respecter les formes, le comte Savelli, maréchal du
conclave, conservait les clés sur lui en permanence, ces clés ne
servaient pas à grand-chose, puisqu’elles ne s’appliquaient qu’à
des portes murées. Les cardinaux, jour après jour, transgressaient
la constitution de Grégoire et cela d’une conscience d’autant
plus légère qu’on avait envers eux usé de la contrainte et de la
violence. Ils ne manquaient pas de le dire, jour après jour, au
comte de Forez, lorsque celui-ci montrait sa tête casquée par
l’étroit orifice qui servait à passer les vivres. À quoi, jour
après jour, le comte de Forez répondait qu’il était tenu de
faire respecter la loi du conclave.
Ce dialogue de sourds pouvait se
poursuivre longtemps. Les cardinaux ne logeaient plus ensemble, comme
le prescrivait la constitution ; car, bien que la nef des Jacobins
fût vaste, y vivre à près de cent personnes, sur de simples
jonchées de paille, était devenu bien vite insupportable. Et
d’abord par la pestilence qui se dégageait, dans la chaleur de
l’été.
— Ce n’est pas parce que Notre-Seigneur est né dans
une étable que son vicaire doit nécessairement être élu dans une
porcherie, disait un cardinal italien.
Les prélats avaient donc
débordé sur le couvent qui communiquait avec l’église et
s’inscrivait dans la même enceinte. Repoussant les moines, ils
s’étaient arrangés tant bien que mal à trois par cellule ou par
chambre de l’hôtellerie, laquelle se trouvait évidemment fermée
aux voyageurs. Chapelains et damoiseaux occupaient les réfectoires.
Le régime alimentaire décroissant n’était pas davantage observé
; l’eût-il été, on n’aurait plus eu bientôt qu’une
assemblée de squelettes. Les cardinaux se faisaient donc envoyer
quelques gâteries de l’extérieur, qu’on prétendait destinées
à l’abbé et aux moines.
On appliquait beaucoup d’habileté et
de constance à violer le secret des délibérations ; des lettres,
chaque jour, entraient au conclave ou en sortaient, glissées dans le
pain ou entre les plats vides. L’heure des repas, de la sorte,
devenait l’heure du courrier, et la correspondance qui prétendait
régler le sort de la chrétienté était fort tachée de graisse. De
tous ces manquements, le comte de Forez instruisait le régent,
lequel semblait s’en féliciter.
« Plus ils auront commis de
fautes et d’inobservances, déclarait Philippe de Poitiers, et
mieux nous serons en mesure de sévir quand nous en prendrons
décision. Pour les missives, laissez-les s’acheminer, en les
ouvrant au passage aussi souvent que vous le pourrez, afin de m’en
révéler le contenu. »
Ainsi fut on averti de quatre candidatures
qui échouèrent presque aussitôt que posées : celle d’abord
d’Arnaud Nouvel, ancien abbé de Font-froide, dont le comte de
Poitiers fit savoir clairement par Jean de Forez « qu’il ne
trouvait pas ce cardinal assez ami du royaume de France » ; puis les
candidatures de Guillaume de Mandagout, d’Arnaud de Pélagrue et de
Bérenger Frédol l’aîné. Gascons et Provençaux se faisaient
mutuellement échec. On apprit aussi que le redoutable Caëtani
commençait à écœurer une partie des Italiens, et jusqu’à son
propre cousin Stefaneschi, par la bassesse de ses intrigues et
l’outrance démente de ses calomnies. N’avait-il pas suggéré
d’un ton de plaisanterie – mais on savait ce que de tels propos
valaient dans sa bouche ! – d’évoquer le diable et de s’en
remettre à lui pour désigner le pape, puisque Dieu semblait
renoncer à faire connaître son choix ? À quoi Duèze, de sa voix
chuchotante, avait répondu :
— Ce ne serait pas la première fois,
Monseigneur Francesco, que Satan siégerait parmi nous.
Si Caëtani
demandait une chandelle, on chuchotait aussitôt qu’il en voulait
fondre la cire pour procéder à un envoûtement. Les cardinaux,
jusqu’à leur internement inattendu, s’étaient opposés les uns
aux autres pour des motifs de doctrine, de prestige ou d’intérêt.
Mais, à présent, d’avoir vécu ensemble tout un mois dans un
espace mesuré, ils se haïssaient pour des raisons personnelles,
presque des raisons physiques. Certains se négligeaient, ne se
rasaient ni ne se lavaient plus, et se laissaient aller à toutes les
libertés de nature.
Ce n’était plus par promesses d’argent ou
de bénéfices que tel candidat cherchait à se gagner des voix, mais
en partageant ses rations avec les gloutons, acte formellement
prohibé. Alors, les dénonciations couraient d’oreille à oreille
:
— Le camerlingue a encore mangé trois plats de son parti…
Si
les estomacs, par ces compensations, parvenaient à peu près à se
satisfaire, il n’en allait pas de même d’autres appétits ; la
chasteté, à laquelle certains cardinaux avaient peu l’habitude de
se soumettre, commençait d’aigrir furieusement le caractère de
quelques-uns. Une plaisanterie circulait parmi les Provençaux :
—
Si d’Auch est prêt à tout pour faire une bonne chère, à Colonne
il n’est chair qui ne soit bonne affaire.
Car les deux Colonna,
l’oncle et le neveu, deux seigneurs athlétiques et mieux bâtis
pour porter la cuirasse que la soutane, traquaient les damoiseaux
dans les couloirs du couvent en leur promettant une bonne absolution.
On ne cessait de se jeter à la tête de vieux griefs :
— Si vous
n’aviez pas canonisé Célestin… si vous n’aviez pas renié
Boniface… si vous n’aviez pas consenti à partir de Rome… si
vous n’aviez pas condamné les Templiers…
On s’accusait
mutuellement de faiblesse dans la défense de l’Église, d’ambition
et de vénalité. À entendre ce que les cardinaux disaient les uns
des autres, on eût cru qu’aucun d’eux ne méritait même un
vicariat de campagne.
Seul Monseigneur Duèze semblait insensible à
l’inconfort, aux intrigues et à la médisance. Depuis deux ans, il
avait tant embrouillé les choses entre ses collègues qu’il
n’avait plus besoin de se mêler de rien, et pouvait laisser ses
perverses machines tourner toutes seules. Frugal par nature et par
habitude, la maigreur de la pitance ne le gênait nullement. Il avait
choisi de partager sa cellule avec deux cardinaux normands ralliés
aux Provençaux, Nicolas de Fréauville, ancien confesseur de
Philippe le Bel, et Michel du Bec, qui, trop faibles pour constituer
un parti, ne figuraient point parmi les « papables ». On ne les
redoutait pas, et leur installation en compagnie de Duèze ne pouvait
pas prendre l’aspect d’une conjuration.
D’ailleurs, Duèze
voyait peu ses deux compagnons. À heure fixe, il se promenait dans
le cloître du couvent, généralement appuyé au bras de Guccio, qui
ne cessait de lui recommander :
— Monseigneur, ne marchez point si
vite ! Voyez, j’ai peine à vous suivre, avec cette jambe roide que
je garde de ma chute, à Marseille. Vous savez bien que vos chances,
si je crois ce que j’entends, seront plus fortes à mesure qu’on
vous croira plus faible.
— C’est vrai, c’est vrai, répondait
le cardinal qui s’efforçait alors de courber le col, de fléchir
le genou, et de discipliner ses soixante-douze ans.
Le reste du
temps, il lisait ou écrivait. Il avait pu se procurer ce qui lui
était le plus nécessaire au monde : des livres, de la chandelle et
du papier. Venait-on l’avertir d’une réunion dans le chœur de
l’église ? Il feignait de quitter à regret sa stalle et là,
écoutant ses collègues s’injurier ou se larder de perfidies, il
se contentait de souffler d’une voix à peine audible :
— Je
prie, mes frères ; je prie pour que Dieu nous inspire le choix du
plus digne. Ceux qui le connaissaient de longue date le jugeaient
bien changé. Il semblait fort s’adonner aux macérations, et
offrait à chacun l’exemple de la bienveillance et de la charité.
Quand on lui en faisait la remarque, il répondait simplement,
accompagnant son murmure d’un geste désabusé :
— L’approche
de la mort… Il est grand temps de me préparer…
Il touchait à
peine à l’écuelle de ses repas et la faisait porter à l’un ou
l’autre de ses rivaux. Ainsi Guccio arrivait les bras chargés
auprès du camerlingue, qui prospérait comme bœuf à l’engrais,
en disant :
— Monseigneur Duèze vous fait tenir ceci. Il vous a
trouvé maigri, ce matin.
Des quatre-vingt-seize prisonniers, Guccio
était l’un de ceux qui communiquaient le plus aisément avec
l’extérieur ; il avait en effet pu établir rapidement une liaison
avec l’agent de la banque Tolomei à Lyon. Par ce relais
s’acheminaient non seulement les lettres que Guccio envoyait à son
oncle, mais aussi le courrier plus secret que Duèze destinait au
régent. À ces lettres-là était épargnée la disgrâce du séjour
dans les plats graisseux ; elles passaient à l’intérieur des
livres indispensables aux pieuses études du cardinal. Duèze, en
fait, n’avait d’autre confident que le jeune Lombard, dont
l’astuce le servait chaque jour davantage. Leur sort était
étroitement lié, car si l’un voulait sortir pape de ce couvent
surchauffé par l’été, l’autre en désirait partir au plus tôt,
et puissamment protégé, afin de secourir sa belle.
Guccio,
toutefois, était un peu tranquillisé au sujet de Marie depuis que
Tolomei lui avait écrit qu’il veillait sur elle comme un oncle
véritable. Au début de la dernière semaine de juillet, lorsque
Duèze vit ses collègues bien las, bien éprouvés par la chaleur,
et irrémédiablement dressés les uns contre les autres, il décida
de leur donner la comédie qu’il méditait et qu’il avait
soigneusement mise au point avec Guccio.
— Ai-je assez traîné le
pied ? Ai-je assez jeûné ? Ma mine est-elle assez mauvaise ?
demanda-t-il à son damoiseau improvisé, et mes compères sont-ils
assez dégoûtés d’eux-mêmes pour se laisser conduire à une
décision de fatigue ?
— Je le crois, Monseigneur, je crois qu’ils
sont bien mûrs.
— Alors, il est temps, je crois, mon jeune
compagnon, de faire travailler votre langue ; pour moi, je vais me
coucher et je ne me relèverai plus guère.
Guccio commença de se
répandre parmi les serviteurs des autres cardinaux, en disant que
Monseigneur Duèze était très éprouvé, qu’il donnait des signes
de maladie, et qu’on devait redouter, vu son grand âge, qu’il ne
sortît pas vivant de ce conclave.
Le lendemain, Duèze ne parut pas
à la réunion quotidienne, et les cardinaux en murmurèrent entre
eux, chacun répétant les bruits que Guccio faisait courir. Le jour
suivant, le cardinal Orsini, qui venait d’avoir une altercation
violente avec les Colonna, rencontra Guccio et lui demanda s’il
était bien vrai que Monseigneur Duèze fût en si grande faiblesse.
— Eh oui, Monseigneur, et vous m’en voyez l’âme toute fendue,
répondit Guccio. Savez-vous que mon bon maître a même cessé de
lire ? Autant dire qu’il a peu de chemin à faire maintenant pour
cesser de vivre.
Puis, de cet air d’audace naïve dont il savait
jouer à propos, il ajouta :
— Si j’étais à votre place,
Monseigneur, je sais bien ce que je ferais. J’élirais Monseigneur
Duèze. Ainsi vous pourriez sortir enfin de ce conclave, et en tenir
un autre à votre guise tout aussitôt qu’il sera mort, ce qui, je
vous le répète, ne saurait tarder. C’est une chance que dans une
semaine vous aurez peut-être perdue.
Le soir même, Guccio aperçut
Napoléon Orsini en conciliabule avec Stefaneschi, Alberti de Prato
et Guillaume de Longis, tous Italiens favorables à Duèze. Le
lendemain, le même groupe se reforma de lui-même dans le cloître,
mais grossi de l’Espagnol Luca de Flisco, demi-frère de Jacques II
d’Aragon, et d’Arnaud de Pélagrue, le chef du parti gascon.
Guccio, passant auprès, entendit ce dernier prononcer :
— Et s’il
ne meurt pas ?
— Ce serait moindre mal, répondit l’un des
Italiens, que de rester ici six mois encore, comme cela nous guette
si nous perdons cette occasion d’élire un moribond.
Aussitôt
Guccio fit passer une lettre pour son oncle où il lui suggérait de
racheter à la compagnie des Bardi toutes les créances que cette
banque possédait sur Jacques Duèze.
« Vous pourrez les obtenir
sans peine à moitié de la valeur, car le débiteur est donné
mourant, et le prêteur vous tiendra pour fol. Achetez, même à
octante livres pour le cent, l’affaire, je vous le dis, sera bonne,
ou je ne suis plus votre neveu. »
Il conseillait en outre à Tolomei
de venir lui-même à Lyon au plus tôt qu’il le pourrait. Le 29
juillet, le comte de Forez fit officiellement remettre au cardinal
camerlingue une lettre du régent. Pour en entendre la lecture,
Jacques Duèze consentit à quitter son grabat ; il se fit porter
plutôt qu’il ne marcha jusqu’à l’assemblée. La lettre du
comte de Poitiers était sévère. Elle détaillait tous les
manquements au règlement de Grégoire. Elle rappelait la promesse de
démolir les toits de l’église. Elle faisait honte aux cardinaux
de leurs discordes, et leur suggérait, s’ils ne pouvaient arriver
à conclusion, de conférer la tiare au plus âgé d’entre eux. Or
le plus âgé était Jacques Duèze.
Quand celui-ci entendit ces
mots, il agita les mains d’un geste épuisé et murmura :
— Le
plus digne, mes frères, le plus digne ! Qu’iriez-vous faire d’un
pasteur qui n’a plus la force de se conduire lui-même, et dont la
place est plutôt au Ciel, si le Seigneur veut bien l’y accueillir,
qu’ici-bas ?
Il se fit ramener dans sa cellule, s’étendit sur sa
couche, et se tourna vers le mur. Le surlendemain, Duèze parut
retrouver un peu de force ; un affaiblissement trop constant eût
éveillé les soupçons. Mais, lorsque vint une recommandation du roi
de Naples qui étayait celle du comte de Poitiers, le vieillard se
mit à tousser de manière pitoyable ; il fallait qu’il fût bien
mal en point pour avoir pris froid par une si forte chaleur. Les
marchandages continuaient ferme, car toutes les espérances n’étaient
pas éteintes.
Mais le comte de Forez commençait à se montrer plus
rude. Maintenant, il ordonnait de fouiller ostensiblement les vivres,
qu’il avait d’ailleurs réduits à un service par jour, et il
confisquait la correspondance ou la faisait rejeter à l’intérieur.
Le 5 août, Napoléon Orsini était parvenu à rallier à Duèze le
terrible Caëtani lui-même, ainsi que quelques membres du parti
gascon. Les Provençaux flairèrent le parfum de la victoire. On
s’aperçut, le 6 août, que Monseigneur Duèze pouvait compter sur
dix-huit voix, c’est-à-dire deux voix de plus que cette fameuse
majorité absolue qu’en deux ans et trois mois personne n’avait
pu réunir.
Les derniers adversaires, voyant alors que l’élection
allait se faire malgré eux, et craignant qu’il ne leur soit tenu
rigueur de leur obstination, se donnèrent les gants de reconnaître
les hautes vertus chrétiennes du cardinal-évêque de Porto, et se
déclarèrent prêts à lui accorder leurs suffrages. Le lendemain, 7
août 1316, on décida de voter. Quatre scrutateurs furent désignés.
Duèze apparut, porté par Guccio et son second damoiseau.
— Il ne
pèse pas lourd, murmurait Guccio aux cardinaux qui le regardaient
passer et qui s’écartaient avec une déférence où se marquait
déjà leur choix.
Quelques minutes plus tard, Duèze était proclamé
pape à l’unanimité, et ses vingt-trois collègues lui faisaient
une ovation.
— Puisque vous le voulez, Seigneur, puisque vous le
voulez… souffla Duèze.
— De quel nom fais-tu choix ? lui
demanda-t-on.
— Jean… Je porterai le nom de Jean… Jean XXII.
Guccio s’avança pour aider à se lever le chétif vieillard devenu
l’autorité suprême de l’univers.
— Non, mon fils, non, dit le
nouveau pape. Je vais m’efforcer de marcher seul. Puisse Dieu
soutenir mes pas.
Les imbéciles crurent alors voir s’opérer un
miracle, tandis que les autres comprenaient qu’ils avaient été
bernés. Ils pensaient avoir voté pour un cadavre ; et voilà que
leur élu fort aisément circulait parmi eux, frétillant et frais
comme une truite. Mais ils ne pouvaient encore imaginer combien il
leur mènerait la vie dure, pendant dix-huit années !
Cependant le
camerlingue avait déjà brûlé dans la cheminée les papiers du
vote, dont la fumée blanche annonçait au monde l’élection du
pontife. Les coups de pioche alors commencèrent à retentir contre
la maçonnerie qui murait le grand portail. Mais le comte de Forez
était prudent ; dès qu’on eut dégagé assez de pierres, il se
glissa lui-même dans l’embrasure.
— Oui, oui, mon fils, c’est
bien moi, lui dit Duèze qui avait rapidement trottiné jusque-là.
Alors, les maçons achevèrent d’abattre le mur ; les deux vantaux
furent ouverts et le soleil, pour la première fois depuis quarante
jours, pénétra dans l’église des Jacobins.
Une foule nombreuse
attendait sur le parvis, bourgeois et petites gens de Lyon, consuls,
seigneurs, observateurs des cours étrangères, qui tous se
pressèrent et s’agenouillèrent tandis que cardinaux et
conclavistes sortaient, formés en procession. Un gros homme, au
teint olivâtre, qui se tenait au premier rang, auprès du comte de
Forez, saisit le bord de la robe du nouveau pape, quand celui-ci
passa devant lui et porta l’ourlet à ses lèvres.
— Oncle
Spinello ! s’écria Guccio Baglioni qui marchait derrière le
pontife.
— Ah ! Vous êtes l’oncle ! J’aime bien votre neveu,
mon fils, dit Duèze au gros homme agenouillé en lui faisant signe
de se relever. Il m’a fidèlement servi, et je veux le garder
auprès de moi. Embrassez-le, embrassez-le !
Le capitaine général
des Lombards se redressa, et Guccio l’étreignit.
— J’ai tout
racheté, comme tu me l’avais dit et à six pour dix, souffla
Tolomei dans l’oreille de Guccio, pendant que Duèze bénissait la
foule. Ce pape nous doit maintenant quelques milliers de livres. Beau
travail, mon garçon. Tu es le vrai neveu de mon sang.
Quelqu’un,
derrière eux, faisait aussi longue figure que les cardinaux ;
c’était le seigneur Boccace, principal voyageur des Bardi.
— Ah
! Tu étais donc à l’intérieur, mécréant, dit-il à Guccio. Si
j’avais su cela, je n’aurais jamais vendu les créances.
— Et
Marie ? Où est Marie ? demanda anxieusement Guccio à son oncle.
—
Ta Marie se porte bien. Elle est aussi belle que tu as de malice, et
si le petit Lombard qui lui enfle le ventre tient de vous deux, il
fera son chemin dans le monde. Mais va vite, va, mon garçon ! Tu
vois bien que le Saint-Père t’appelle.
Demain "La loi des mâles" 2ème partie - ch. 3 "Les dettes du crime''
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