En
1908, les jurés du Goncourt couronnèrent Écrit sur de l'eau,
faisant entrer dans l'histoire littéraire un jeune homme de
vingt-huit ans : Francis de Miomandre. Or l'argument et la trame du
livre sont d'une légèreté absolue. C'est un pied de nez de
l'auteur qui met dans ce roman autant de frivolité que
d'inconsistance - volontairement car le sujet est sérieux : l'amour
et la jeunesse qui passe. Ainsi Miomandre raconte sur un ton badin et
faussement détaché les aventures d'un très jeune homme, Jacques de
Meillan, qui s'interroge sur l'amour, traîne dans sa Marseille
natale très début de siècle et attend de participer à son premier
bal. C'est charmant, c'est doux. Avec Écrit sur de l'eau, c'est une
sucrerie très légère - une sucrerie parfois amère. Ça pourrait être
un mauvais roman à l'eau de rose, c'est un délice littéraire.
‘’Maintenant
que la vingt-sixième année, comme un ver dans le fruit de sa
jeunesse vermeille, y commence un travail néfaste et l'altère déjà
de ces tons inquiétants que l'optimisme appelle maturité, mais qui
pour lui ne sont que les signes avant-coureurs de la décrépitude et
de la décadence morale et physique, je pense qu'il faut que je me
Mte de recomposer par le souvenir la figure que fit dans le monde mon
ami Jacques de Meillan, dans la fleur de sa saison. O toi que
j'envisage comme un être bienveillant et sensible, ô toi qui as
acheté sur moi tous les droits pour tes trois francs et même pour
tes quinze sous, si tu as eu la patience de me rechercher, dans une
des boîtes des quais de la Seine, quelques jours après ma
publication, ô incomparable et fraternel lecteur, puissant lecteur,
ne dis pas, je t'en prie, ne dis pas que cette histoire est sans
intérêt : d'abord parce que tu n'en sais rien, ensuite parce
qu'ainsi, de la faute d'une appréciation anticipée, tu m'ôterais
toute raison d'être... et de paraître. Et, je te le demande,
qu'est-ce que je serais si je ne paraissais pas ? ‘’
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