Mado
Robin est morte à Paris dans la soirée du 10 décembre 1960, Elle
avait 42 ans. Dès la nouvelle de sa mort connue, tous les théâtres
parisiens ont interrompu leur représentation pour l'annoncer. Ce fut
quasiment un deuil national. Elle avait su comme personne toucher le
cœur des français, mélomanes ou non. Cantatrice certes, mais elle
était loin des clichés des divas et des éclats médiatiques des
Callas et Tebaldi. Certains critiques, il y en a toujours, mettaient
en cause sa technique vocale, la considéraient plus comme un
phénomène vocal que comme une chanteuse, raillaient sa proximité
avec les gens, sa gentillesse, sa naïveté, n'osant pas dire sa
niaiserie. Mais ce n'était pas le cas des musiciens, chefs
d'orchestre, musicologues et amoureux de l'art lyrique tous subjugués
par sa voix. Sacha Guitry parlait de sa ''divine facilité'' et
ajoutait ''C'est un arbre qui chante, le vent n'a qu'à passer''.
Mario Podesta son professeur de chant disait :''C'est facile de
chanter quand on chante ''comme ça'' mais c'est très difficile de
chanter comme ça''. Lors de la première répétition de ''La flûte
enchantée'' le premier violon demande à Reynaldo Hahn qui
dirigeait :''On transpose comme d'habitude l'air de la Reine de
la nuit ?'' La réponse fut sèche :''Avec Mado Robin on ne
transpose pas''.
Sa voix en effet montait à des hauteurs
vertigineuses. Jusqu'au contre-contre ré. Les spécialistes
apprécieront. Aux Etas-Unis on la surnommait ''the french
stratospheric colorature'' et un journal titrait ''Mado Robin
franchit le mur du son''. Malgré cette reconnaissance, elle
n'hésitait pas à faire la réouverture d'un music-hall, l'ABC, de
chanter dans des fêtes populaires comme la Kermesse aux étoiles ou
au profit d'oeuvres sociales. J'ai eu la chance de l'entendre chanter
''Le barbier de Séville'' en 1956/57 à Bastia.... au cinéma Le
Paris. Ce fut ma première approche déterminante avec l'art lyrique.
Elle était également très présente à la radio et à la
télévision dans des émissions très populaires comme les ''36
chandelles'' de Jean Nohain. Tout cela explique ce rapport très
particulier qu'elle entretenait avec les français qui en avaient fait
un peu leur trésor national.
Pour
en revenir à sa voix, Mado Robin était une soprano colorature ce
qui demande une grande virtuosité et de pouvoir chanter dans l'aigu
et le suraigu. Cela limite un peu le répertoire : La Reine de
la nuit (La flûte enchantée), Gilda (Rigoletto), Lakmé, Olympia
(les contes d'Hofmann)... Dans la vidéo qui suit, l'air de la folie
de Lucia di Lammermoor de G. Donizetti, Mado Robin atteint le
contre-contre-ré. Note tellement élevée qu'aucun compositeur ne
l'a écrite, ne pouvant pas penser qu'on la chanterait un jour, Le
contre-contre ré c'est 6 lignes supplémentaires au dessus de la
portée normale ; les cordes vocales vibrent à 2320
vibrations/secondes.
Vous
n'avez jamais entendu de contre-contre ré ? En voilà un. J'ai
préféré, pour l’émotion, une version piano en direct, plutôt
que la version studio (disponible sur you tube). Pour finir deux
conseils ! Evitez d'écouter cela au casque et rangez vos verres
en cristal...
attention les oreilles à la fin !!
RépondreSupprimerDes frissons !!!
RépondreSupprimeroui, à la limite de l'humain
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