Aux
yeux de ses voisins, Don Corleone est un patriarche,
un
respectable père de famille qui a su donner à ses
enfants
une éducation où les rigoureux principes de la
morale
sicilienne s'adaptent aux nécessités de la vie
américaine.
Mais sa vraie famille est plus vaste ; c'est
une
des "familles" de la Mafia dont il est un des chefs les
plus
aimés, mais aussi les plus respectés, car il est
raisonnable
et juste. Pour eux, il est le Parrain.
Le
Parrain, c'est l'évocation d'un monde souterrain qui
sape
les fondations de l'Amérique, d'une pègre
redoutable
que la société voudrait ignorer, mais que de
retentissants
scandales ne cessent de révéler au grand
jour.
De New York à Las Vegas, des somptueuses villas
de
Hollywood au maquis de Sicile, voici le portrait d'une
nation
gangrenée par ses syndicats du crime, sa guerre
des
gangs et ses puissances occultes.
''Assis
dans la salle d’audience du 3è tribunal criminel de
New
York, Amerigo Bonasera attendait que la justice se
prononce
et le venge des deux hommes qui avaient si
cruellement
blessé sa fille, après avoir tenté de la
déshonorer.
Le juge, personnage massif et d’aspect
redoutable,
releva les manches de sa robe comme s’il se
proposait
d’infliger un châtiment corporel aux deux
jeunes
gens qui se tenaient debout devant lui. Une
expression
de mépris majestueux et glacé était
empreinte
sur ses traits. Mais il y avait dans son attitude
quelque
chose de factice que Bonasera percevait fort
bien
sans se l’expliquer encore. « Vous vous êtes conduits
comme
des dégénérés de la pire espèce », s’écria le juge,
d’une
voix agressive. C’est vrai, c’est vrai, pensa
Bonasera.
Des bêtes, des chiens. Les deux jeunes gens,
visage
rasé, luisant comme un sou neuf, cheveux drus et
lustrés,
proprement taillés en brosse, inclinèrent
modestement
la tête et se composèrent le visage de
l’humilité
contrite. « Vous vous êtes conduits comme des
fauves
dans la jungle, reprit le juge. Et c’est une chance
pour
vous que cette pauvre jeune fille ait su défendre
son
honneur, sinon vous en aviez pour vingt ans. Mais, en
raison
de votre jeunesse, de vos familles honorables,
parce
que vous n’avez encore jamais été condamnés et
parce
que, dans sa majesté, la loi ne cherche pas de
vengeance,
je vous condamne céans à trois ans
d’internement
dans un pénitencier. Avec bénéfice du
sursis.
»
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