Où était passée Agatha
Christie entre le 3 et le 14 décembre 1926?
En 1926, Agatha Christie
se retrouva au coeur d'une étrange affaire, qui semblait tout droit sortie d'un
de ses romans, mais qu'aucun Hercule Poirot, aucune miss Marple n'ont jamais
élucidée. La romancière avait alors 36 ans, et tout semblait lui réussir.
Écrivain déjà renommé,
mariée à un héros de la Grande guerre, le colonel Archibald Christie, elle
vivait dans une splendide maison de campagne, qu'elle a elle-même décrite comme
« une sorte de suite pour millionnaires du Savoy, transplantée en pleine
campagne ».
En 1926, Agatha Christie
se retrouva au cœur d'une étrange affaire.
Celle que l'on a surnommé
la reine du crime était née Agatha Clarissa Miller en 1890. À l'âge de 24 ans,
elle avait épousé Archibald Christie, un aviateur du Royal Flying Corps, qui
devait se couvrir de gloire pendant la Grande guerre, tandis qu'Agatha
travaillait comme infirmière dans un hôpital.
Peu après la fin de la
guerre, il mit au monde son unique enfant, Rosalind.
Un an plus tard, elle
publiait son premier roman, " la mystérieuse affaire de Styles".
En 1926, douillettement
installés dans leur demeure du Berkshire, les Christie semblaient un ménage
heureux. En fait, la crise qui couvait depuis longtemps entre les époux était
sur le point d'éclater.
A cette époque, Agatha
Christie avait déjà publié plusieurs romans policiers. Son dernier opus,
"Le meurtre de Roger Ackroyd", avait connu un grand succès, mais
également suscité de vives polémiques.
Dans ce roman écrit à la
première personne, le narrateur dissimule au lecteur quelques informations
essentielles, et tout d'abord le fait que c'est lui l'assassin !
Si le « narrateur non
fiable » est un procédé littéraire classique, il scandalisa ceux qui aiment
déduire avant Hercule Poirot l'identité du coupable.
Les critiques, eux,
adorèrent. Quoi que déjà connue, Agatha Christie n'était pas encore célèbre ;
la plupart de ces livres ne s'étaient vendus qu'à quelques milliers
d'exemplaires.
C'est alors qu'au soir du
3 décembre 1926, elle quitta le domicile conjugal et disparut. Du jour au
lendemain, le pays tout entier se passionna pour son sort.
À 11 heures le lendemain
matin, le superintendant de la police de Surrey fut informé d'un accident de
voiture à Newlands Corner, à la sortie de Guildford. La Morris de Mrs. Christie
venait d'être retrouvée dans un fossé, le capot enfoncé dans les buissons. Il
n'y avait aucune trace de la conductrice, mais celle-ci ne devait pas être
allée bien loin, car son manteau de fourrure était resté dans la voiture.
En milieu d'après-midi,
une meute de journalistes se pressait devant les domiciles des Christie. Dès le
début, la police envisage l'hypothèse du suicide ; une théorie réfutée par son
mari, qui soulignait non sans raison que la plupart des gens se suicident chez
eux, et non pas en sortant en voiture au beau milieu de la nuit. Néanmoins, la
police ratisse à la campagne autour de Newlands Corner ; des plongeurs allèrent
sonder le Silent Pool, un lac situé dans les environs.
Ce que tout le monde
ignorait, c'est que rien n'allait plus au sein du couple. Archie était tombé
amoureux d'une femme de 10 ans plus jeune qu'Agatha, Nancy Neele.
Il avait même annoncé à sa
femme son intention de divorcer. Autre coup du destin, Agatha venait de perdre
sa mère. Elle ne dormait plus, s'alimentait n'importe comment, déplaçait sans
cesse ses meubles et objets dans sa maison.
Elle semblait
manifestement perturbée, au bord de la dépression nerveuse.
Les deux ou trois jours
suivants n'apportèrent aucun indice nouveau. L'annonce qu'on avait retrouvé des
vêtements de femme et un flacon étiqueté « opium » dans une cabane isolée
déclencha la ruée des journalistes, mais ce n'était qu'une fausse alerte :
l'opium se révéla être du bicarbonate.
Des journaux insinuèrent
qu’Archibald Christie avaient tout à gagner à la mort de son épouse, mais son
alibi était à toute épreuve : il participait à une partie de campagne dans le
Surrey.
D'autres journalistes
subodorèrent « un coup de pub ». L'un des proches d'Agatha, Peter
Ritchie-Calder, pensait qu'elle avait disparu pour faire éclater au grand jour
la liaison de son mari avec Nancy Neele.
Il se mit à éplucher ses
romans pour essayer de deviner ce qu'elle allait faire ensuite. Le "Daily
Mirror" offrit une récompense à quiconque retrouverait Mrs. Christie. En
vain.
Le mystère s'épaissit
encore un peu plus lorsque le beau-frère d'Agatha révéla qu'il avait reçu une
lettre d'elle. D'après le cachet de la poste, elle avait été postée à Londres à
9:45, le lendemain du jour de sa disparition, autrement dit à une heure où elle
était censée errer quelque part dans les bois du Surrey.
Le dimanche suivant, dans
une interview au "Daily Mirror", Archibald reconnu que son épouse
avait « évoqué la possibilité de disparaître à son gré.>>
Quelque temps auparavant
elle avait dit à sa sœur : je pourrais disparaître si je le voulais, en
m'organisant bien… ».
Peut-être, après tout,
s'agissait-il d'autre chose que d'un suicide ou d'un coup monté par le mari…
A suivre...
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