Assis côté hublot à l'arrière de la carlingue, je
regarde Orly et Paris s'éloigner comme dans un zoom arrière. Puis plus rien. Le
Boeing vient de rentrer dans la couche nuageuse. Ce n'est pas mon premier
voyage long courrier, mais en jet, si. Le dernier remonte à 1950, un vrai
périple. Rapatrié pour des raisons de santé je suis confié à l'équipage d'un
DC3 d'Air France, mi-passager mi-frêt. Fort-Lamy, où je quitte mes parents,
escales à Bidon 5, poste à essence en plein milieu du désert algérien, Alger, Marseille,
Paris le Bourget, où je serai récupéré par mes grands parents.
L'avion sort de la couche de nuages. Y a pas plus
bleu, y a pas plus blanc.
La loupiote ''fasten your seat
belt''et ''no smoking'' s'éteint. Autour de moi les mains plongent
dans les poches. Une annonce : ''Monsieur C... est prié de se faire connaître
du personnel de bord''!! Qu'est ce que j'ai fait??? Je lève la main. Une
hôtesse s'approche.
Vous
êtes Mr C....?
Oui !
Un
passager a demandé si vous étiez à bord et souhaite vous rencontrer.
Le siège à côté de moi est libre. Trois minutes
plus tard un jeune homme de 25 ans environ s'approche de moi, petit, blond, le
visage pointu. Il me tends la main et sourit. Il a les lèvres très minces.
Bonjour,
je suis Daniel B... Le chef du personnel m'a dit que vous étiez sur ce vol.
Son patronyme sent le Normand bon teint.
Asseyez
vous.
Deux whiskies plus tard on se connaît un peu
mieux; enfin moi je le connais un peu mieux. Il est en effet normand, il vient
de terminer une école de commerce, n'a jamais quitté la France mais un de ses
oncles lui a parlé de l'Afrique et ça lui a donné envie. Et puis il y a le CFA.
Il est tout jeune marié, sa femme le rejoindra dans trois mois. Il sort de son
porte feuille une photo. C'est un tout petit format aussi. Tout semble petit
chez elle sauf ses yeux immenses et bleus. A eux deux ils ne doivent pas avoir
plus de 45 ans et ne pas peser plus de 90 kilos.
Le plateau repas et le Bordeaux aidant, je tartine
un peu ma connaissance de l'Afrique mais je ne suis qu'à moitié convaincu de la
réalité de ma vision un peu ancienne.
De mes nombreux ultérieurs voyages en avion j'ai
appris deux choses : le vin monte plus vite à la tête et les pieds gonflent!
Café et cognac avalés, il rejoint sa place, je
baisse mon dossier et je n'ai pas le temps d'essayer d'imaginer ce qui
m'attends. Je m'endors.
Cinq heures plus tard :'' Mesdames et messieurs
nous amorçons notre descente vers l'aéroport Léon Mba de Libreville. Il est
18h30 heure locale. La température au sol est de 29°''. Mon hublot est du côté
mer. Je vois un superbe coucher de soleil. Le soleil plonge littéralement dans
une eau rougeoyante . J'apprendrai qu'il se lève aussi vite qu'il se couche.
Sur 24 heures il y en a 11 de jour, 11 de nuit le reste se partageant entre
aube et crépuscule. L'avion fait un virage sur la gauche. Je vois les lumières
de Libreville, un mince filet lumineux, la route du bord de mer et un peu plus
haut les pistes éclairées de l'aéroport. Passés les buildings du centre de
Libreville, ce sont des petites maisons, des villas au milieu de jardins. La
végétation est incroyablement dense et verte, d'un vert profond. L'obscurité
tombe. Il fera nuit quand nous atterrirons.
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