Romain
Gary – La vie devant soi
La
première chose que je peux vous dire c'est qu'on habitait au sixième
à pied et que pour Madame Rosa, avec tous ces kilos qu'elle portait
sur elle et seulement deux jambes, c'était une vraie source de vie
quotidienne, avec tous les soucis et les peines. Elle nous le
rappelait chaque fois qu'elle ne se plaignait pas d'autre part, car
elle était également juive. Sa santé n'était pas bonne non plus
et je peux vous dire aussi dès le début que c'était une femme qui
aurait mérité un ascenseur.
Je devais avoir trois ans quand j'ai vu Madame Rosa pour la première fois. Avant, on n'a pas de mémoire et on vit dans l'ignorance. J'ai cessé d'ignorer à l'âge de trois ou quatre ans et parfois ça me manque.
Il y avait beaucoup d'autres Juifs, Arabes et Noirs à Belleville, mais Madame Rosa était obligée de grimper les six étages seule. Elle disait qu'un jour elle allait mourir dans l'escalier...
Je devais avoir trois ans quand j'ai vu Madame Rosa pour la première fois. Avant, on n'a pas de mémoire et on vit dans l'ignorance. J'ai cessé d'ignorer à l'âge de trois ou quatre ans et parfois ça me manque.
Il y avait beaucoup d'autres Juifs, Arabes et Noirs à Belleville, mais Madame Rosa était obligée de grimper les six étages seule. Elle disait qu'un jour elle allait mourir dans l'escalier...
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