Le
Robert, dictionnaire historique de la langue française. Mieux et
plus qu'un dictionnaire, La Bible, Le livre, La référence absolue
pour tous les amoureux des mots et de la langue française. Et il n'y
manque pas un accent circonflexe.
Travailler
est
issu (1080) d'un latin populaire °tripaliare,
littéralement
« tourmenter, torturer avec le “trepalium” », du bas latin
trepalium,
nom
d'un instrument de torture.
P.
Guiraud invoque un croisement entre trepalium
et
le roman trabiculare
de
trabicula
«
petite poutre ». Trabicula
a
pu désigner le chevalet de la question et °trabiculare
signifier
« torturer » et « travailler », c'est-à-dire supporter une
charge comme le chevalet
En
ancien français, et toujours dans l'usage classique, travailler
signifie
« faire souffrir » physiquement ou moralement,
intransitivement « souffrir » (XIIe s.) et se
travailler «
se tourmenter » (XIIIe s.). Il s'est appliqué spécialement à un
condamné que l'on torture (v. 1155), à une femme dans les douleurs
de l'enfantement (v. 1165 ), à une personne à l'agonie (v. 1190) .
Par
ailleurs le verbe a signifié « molester (qqn) » (1249), puis
«endommager (qqch.) » (XVe s.) et encore « battre (qqn) » (XVIIe
s. ; 1636, travailler
sur qqn)
à l'époque classique, d'où travailler
les côtes à qqn (1793,
travailler
les côtelettes)
qui pourrait encore se dire, et en boxe travailler
(l'adversaire) au corps (XXe
s.).
Le
verbe s'est aussi employé pour « agiter (l'eau d'un fleuve, etc.) »
(v. 1270), d'où l'intransitif travailler
«
être agité » (v. 1709), encore représenté avec une valeur
abstraite ( travailler
du chapeau).
Cependant,
dès l'ancien français, plusieurs emplois impliquent l'idée de
transformation acquise par l'effort ; se
travailler «
faire de grands efforts » (v. 1155), avec une valeur concrète et
abstraite, se maintient jusqu'au XIXe s., précédant travailler
à «
exercer une activité qui demande un effort » (v. 1200) ; travailler
un cheval «
le soumettre à certains exercices » (1373) est encore en usage au
XIXe siècle.
Cependant,
en moyen français, l'idée de transformation efficace l'emporte sur
celle de fatigue ou de peine. Le verbe se répand aux sens de «
exercer une activité régulière pour assurer sa
subsistance
» (1534), d'où faire
travailler «
embaucher » (1581). À partir du XVIIIe s., le verbe peut avoir pour
sujet le nom d'une force productive ou d'une entreprise en
fonctionnement (1723).
Au
XVIe s., il a aussi le sens de « rendre plus utilisable », d'abord
à propos d'un ouvrage de l'esprit (1559, travailler
le style).
Travailler
à qqch. signifie
(fin XVIe s.) « participer à son exécution ». Le verbe, employé
absolument, s'est dit en argot pour « voler » (1623), puis «
assassiner » (1800) et « se prostituer » (1867), spécialisations
de l'idée de travail professionnel dans un contexte d'illégalité.
Dans
le même usage populaire, l'idée de « dérangement cérébral »
est exprimée par celle de « travail mental » dans des expressions
du type travailler
du chapeau (1932),
suivi par des équivalents (...du
canotier, du bigoudi, de la touffe).
Le
déverbal
TRAVAIL,
TRAVAUX n.
m. (v.
1130) présente le même type de développement sémantique que le
verbe : jusqu'à l'époque classique, il exprime couramment les idées
de tourment (v. 1140), de peine (v. 1130) et de fatigue. Il se dit
spécialement des douleurs de l'enfantement (v. 1462) et aujourd'hui
dans quelques expressions en
médecine
comme salle
de travail et
femme
en travail.
Le
pluriel travaux
s'est
spécialisé à l'époque classique (1611) pour parler d'entreprises
difficiles et périlleuses.
Ce
pluriel entre dans les syntagmes travaux
forcés (1795
; 1768, travail
forcé)
désignant en droit pénal la sanction qui succède aux galères, et
travaux
publics, autrefois
(1727) « peine correctionnelle », puis spécialisé pour «
constructions, travaux de voirie... ».
En
français d'Afrique, l'expression travail
forcé s'appliquait
à l'époque coloniale aux travaux imposés par l'administration
coloniale, souvent non rémunérés.
À
la même époque, le singulier commence à s'appliquer à l'activité
d'une machine, au fonctionnement d'un organe (1790) et à l'action
d'une cause naturelle aboutissant à une transformation (1783),
développant l'emploi abstrait (av. 1850, le
travail du temps)
dont procède la valeur du mot en
psychanalyse
(XXe s., travail
du rêve, travail du deuil, traduction
de Freud).
Au
XIXe s., le mot désigne l'activité humaine organisée à
l'intérieur du groupe social et exercée régulièrement (1803). Par
métonymie, le
travail est
appliqué à l'ensemble des travailleurs (1877) et spécialement aux
travailleurs
salariés des secteurs agricole et industriel, alors opposé à
capital
(pour
« ensemble des capitalistes »). On parle ainsi du monde
du travail.
Au
XIIIè siècle le mot ''travailleur'' signifie ''celui qui fait
souffrir'' (mot appliqué au bourreau) et ''celui qui veut du mal à
quelqu'un''.
Quant
à ''travailleuse'' qui a désigné un petit meuble
pour les travaux de dames (1830, Balzac), l'argot l'a repris avec
l'un des sens populaires pour
« prostituée ».
Ce
qui donne tout son sel à l'entame des discours d'Arlette Laguillier
''Travailleurs, travailleuses'' qui n'incite pas vraiment à
l'euphorie... Là c'est moi qui cite. Pas Robert...
Alors,
le travail c'est vraiment la santé ??? A vous de voir.
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