Palamède
XV de Guermantes est le frère cadet du duc de Guermantes. Il devrait
porter le titre de prince des Laumes, mais, « avec une
apparente simplicité où il y a beaucoup d'orgueil », il
ne porte que celui de Baron de Charlus. Il est aussi duc de Brabant,
damoiseau de Montargis, prince
d'Oléron, de Carency, de Viareggio et des Dunes, membre de
l'Ordre de Malte et du Jockey Club (dont il sera exclu à la suite
d'une vie trop scandaleuse). Il est de la famille des ducs de
Guermantes dont les membres parcourent à de multiples reprises les
pages de La Recherche, il porte le nom de "Palamède",
comme les rois de Sicile, ses ancêtres.
‘’Je
tournai la tête et j'aperçus un homme d'une quarantaine d'années,
très grand et assez gros, avec des moustaches très noires, et qui,
tout en frappant nerveusement son pantalon avec une badine, fixait
sur moi des yeux dilatés par l'attention. Par moments, ils étaient
percés en tous sens par des regards d'une extrême activité, comme
en ont seuls devant une personne qu'ils ne connaissent pas des hommes
à qui, pour un motif quelconque, elle inspire des pensées qui ne
viendraient pas à tout autre - par exemple des fous ou des
espions.’’
C’est
ainsi qu’apparaît au Narrateur le baron de Charlus dans ‘’A
l’ombre des jeunes filles en fleurs’’.
Le
baron de Charlus est avec Swann et Albertine l'un des trois
personnages principaux de la Recherche si l'on attribue ce statut à
ceux qui entretiennent le rapport le plus étroit avec Proust
lui-même.
Personnage
complexe et ambigu, à la volonté virile et aux gestes efféminés,
aristocrate parisien très en vue dans la haute société du Faubourg
Saint Germain, M. de Charlus est un homme cultivé, aux goûts
raffinés et à la piété assumée. Né dans les années 1850, il a
une quarantaine d'années quand le narrateur le rencontre.
Anti-dreyfusard convaincu, il ne se montre pourtant antisémite que
quand cela lui permet de cacher sa vraie nature. Car M. de Charlus
est un "inverti", un homosexuel attiré par les jeunes
garçons et Proust en fait même l'emblème de ce "côté de
Sodome''. Il emploiera les termes de ''charlisme'' ou de ''un
monsieur de Charlus'' pour évoquer d'autres invertis.
D'autres
personnages lui attribuent nombre de sobriquets: il est Mémé pour
les intimes, Taquin le superbe pour sa belle soeur la duchesse de
Guermantes, ma petite gueule pour Jupien son amant tenancier d'un
bordel ou encore l'homme enchainé pour les fripouilles de ce
bordel!!
Certains
iconoclastes ont vu dans son nom contrepèteries et anagrammes. dans
Palamède on peut voir ma pédale, pet malade, mâle et dame et avec
Palamède de Charlus on n'est pas loin de pal à merde de cul sale
(sic)!
Les
probables modèles de M. de Charlus seraient Robert de Montesquiou (peint ici par Boldini),
pour son allure générale, son orgueil, son insolence et ses dons
artistiques ,
le baron Doäzan, poudré et bouffi, amoureux d'un violoniste
polonais, le comte Aymeri de la Rochefoucauld pour sa morgue et la
dureté de ses mots, le trouble Oscar Wilde et en partie Proust lui
même. le baron doit aussi un peu à Lyautey, le futur maréchal,
époux inoffensif d'Inès Fortoul, un temps promise à Proust!
Partageant avec Charlus cette incapacité, il sera du lit oté,
délicate contrepèterie vers le thé au lit de la tante du
narrateur!! A propos de Lyautey: un militaire parlant de la bravoure
du maréchal pendant la guerre de conquête du Maroc dit au général
de Gaulle :" Il avait des couilles" ce à quoi le général
aurait répondu : "Oui! Surtout derrière!!" Ah cet humour
d'artilleur!! S'il est le plus dramatique des trois grands personnages
proustiens dans des scènes où il peut se montrer tour à tour
comique ou pathétique, il est surtout le plus tragique. Swann et
Albertine ont disparu. Mais Proust va conduire Charlus jusqu'au
''Temps retrouvé'' jusqu'à sa déchéance physique et sociale. Les
lieux d'où il s'exprime n'ont plus rien de commun avec l'intimité
des Jeunes filles en fleurs ni la haute mondanité de Sodome et
Gomorrhe. La maison de passe de Jupien, un trottoir, un porche
d'hôtel le montrent entouré, non plus d'une cour de princes de sang
mais d'une cour des miracles. Sa décadence mondaine et amoureuse, sa
santé compromise, ses relations avec les '''apaches'' rabaissent
impitoyablement et envoient celui qui avait voulu s’élever dans une
sorte de béatitude inversée!
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